Nom: OROU YERIMA
Prénom : Frédéric
Âge : 20 ans
Profession : Étudiant
Tel: 01 42 14 26 88
Titre de l'oeuvre : Le soleil de Minuit
L’histoire se déroule quelque part en Afrique de l’Ouest.
1
Ce fameux mois d’août, alors qu’Adissa venait tout juste de décrocher le Brevet d'Etudes du Premier Cycle, '' BEPC '' avec brio, son père l’appela tranquillement pour lui dire d'abandonner l’école et de se marier. Ainsi dit-il :
__ Déjà que tu as le BEPC, la seule chose que tu dois faire maintenant, c'est de te marier car a partir du second cycle, notre gouvernement ne prend plus en charge la contribution scolaire des filles comme il le fait au premier cycle''.
Adissa perdit la vue une minute, elle ne croyait pas à ce qu’elle venait d’entendre. D'une voix déchirée et meurtrie, répondit-elle à son père :
__ Mais père, toutes mes amies veulent continuer et leurs parents sont d'accords, pourquoi est-ce moi je devrais abandonner ? Non père, je veux étudier, je veux continuer à étudier père !
__ Tu sais ma fille, tu as même déjà trop étudié. Dans notre famille, on étudie pas trop comme ça, encore moins une fille. Tu as vu toutes tes sœurs, aucune d’entre elles n’a fait plus de deux ans à l’école. Elles sont maintenant toutes mariées, ont des enfants, des grands garçons qui eux aussi, vont bientôt se marier et faire des enfants. C’est ça qui fait la grandeur de notre famille. Toi, tu as même eu la chance de faire jusqu’à dix années à l’école et tu me dis encore tu veux continuer à étudier? Alors dis-moi, à quel âge penses-tu te marier ? Heureusement que c’est pas toi qui décide.
__ Papa, non papa s’il te plait, s’il te plait papa, je veux encore étudier, je ne veux pas le mariage.
Le vieillard tourna dos sans même entendre les surplus de sa fille.
Les yeux de la jeune fille de 16 ans commençaient déjà à larmoyer. Adissa avait raison, il y avait de milliers de faits qui pouvaient expliquer son désarroi. Ainsi la jeune fille de 16 ans n'était pas seulement brillante à l'école, mais elle était aussi l'espoir de son établissement. Durant son parcours de la première classe à la dixième classe, elle n'était toujours que la première. Elle était tellement déterminée à étudier au point où elle passait, elle seule, des heures supplémentaires à l'école. Elle était toujours la dernière à se coucher et la première à se lever. Elle était toujours avec un cahier, un livre, un article ou un journal dans les mains. Ses enseignants lui disaient à plusieurs reprises qu’elle a un bel avenir mais elle n’y prêtait guère attention, elle voulait juste travailler et réussir.
Si le directeur du collège général de Kpara ne cessait à chaque fin du mois, de la rendre visite avec des stylos, des livres et des craies, c'est justement parce qu'il mettait tout espoir sur la jeune fille pour remporter des concours régionaux, nationaux afin de valoriser l'image de son établissement. Le directeur ne cessait de dire aux parents de Adissa :
_ votre fille est l'espoir de ce pays et de ce monde. Encadrez la bien !
_ Merci bien Monsieur le Directeur pour vos mots encourageants de tous les jours, disait le père d'Adissa.
_ J'aurais aimé qu'elle soit à moi et à moi seul, taquinait souvent le Directeur en souriant.
_ Ah bien sûr qu'elle est à toi aussi monsieur le directeur, persuadait le père de la jeune fille. Puis riaient-ils ensemble et disposaient.
Mais si depuis cette annonce, les yeux d'Adissa ne cessaient toujours pas de couler des larmes, c'était pour une bonne raison. C'était parce qu'elle connaissait déjà son père, oui son père. Elle savait déjà avec qui et à quoi elle avait à faire. En effet, le père de la jeune fille de 16 ans était intransigeant dans ses décisions. On ne s'oppose pas à l'une de ses décisions, sinon la personne courageuse qui ose s'opposer, subira l'éternel sort du maître de la maison.
D'ailleurs, Adissa se rappelle très bien du gifle qu'elle avait reçue lorsqu'elle avait douze ans pour avoir dit à son père qu’on leur a appris à l’école de ne pas frapper sur les femmes alors qu'à chaque minable erreur, le papa de la jeune fille menaçait et même donnait des coups à sa maman et ce, devant la petite. Mais lorsque ce jour, la jeune fille, avec un regard désespéré, les larmes aux yeux, voyait sa mère abattue suite à ces coups violents de son père, c’était là l’unique phrase qu’elle pu prononcer pour espérer venir à son secours. Mais malheureusement, son père après lui avoir collé une bonne gifle qui reproduisit tous les cinq doigts sur sa joue , lança-t-il :
_ La prochaine fois, c'est mes deux pieds qui laisseront ses empreintes sur ta tête. Idiote ! Tu as quel âge pour me dicter des lois, moi ton père, hein ? D'ailleurs on verra où ton école t'emmènera.
En effet, l'on apprend que dans la culture Bhous, d'où provient d'ailleurs la famille d'Adissa, les choses sont ce qu'elles sont. C'est à dire, déjà dès le premier jour qu'une fille voit le monde, deux ou trois prétendants viendront demander la main du nouveau née en mariage quand
celle-ci aura grandi. Ce n'est pas encore drôle. Le paradoxe, c'est qu'il n'y a pas un âge requis pour ça. Tout dépendra des parents ou des capacités de l'homme qui aura gagné la main de l'enfant née et aussi de la progression de cette dernière. Ceci étant, si c’est à 15 ans que la carrure de la jeune fille impressionne son prétendant mari, alors celui-ci rapidement, organisera son mariage. C’est comme cela que fonctionne la tradition Bhous.
Voilà pourquoi, malgré les cris et pleurs de la jeune fille à continuer l'école, rien n'a changé. Sa mère ne pouvait rien faire. Devant le maître de la maison, la décision d'une femme ne comptait pas. D'ailleurs voulais t-elle encore recevoir un coup équivalent à celui d'un militaire en crise, surtout quand on sait que ceci ne changera rien ? Le Directeur lui aussi avait tout essayé, mais comme ils le savaient tous, le père d'Adissa est resté intransigeant sur sa décision.
C'était désormais clair, rien n'était plus caché. Le père d'Adissa était d’accord pour un mariage. Oui un mariage entre sa fille et l'homme avec qui il a lié sa fille depuis naissance comme le veulent les coutumes, d'ailleurs l'on apprend que lui-même s'était marié de la même façon. Mais pourquoi un pareil moment où personne ne s’y attendait ? L'on apprend qu'une semaine avant, certains membres de la famille de l'homme étaient venus voir le maître de la maison, et avaient avoué leur intérêt de marier la fille de 16 ans. Ils auraient même dit qu'ils seraient prêts à prendre tout en charge, la dot, y compris toutes les dépenses du mariage. Oui tout ! Il n'y avait aucun doute, les nouveaux maître d'Adissa étaient les plus grands producteurs d'igname de la zone. Mais qui était ce chanceux lauréat de la main d'Adissa ? Kôra. C’était Kôra, l'homme qui a abandonné l’école seulement trois jours après son entré pour s'occuper du champ.
Mais la jeune fille n'était obsédée que par une seule chose : étudier. Ses amis l’auraient même entendu parlé très souvent de son rêve de devenir ministre de la justice un jour dans l'intention de combattre les différentes injustices au sein de la société.
En réalité, la jeune fille de 16 ans était déjà vendue depuis sa naissance par ses coutumes et ne pouvait rien faire, étant encore une fille dont la voix ne compte pas. Seule peut-être sa détermination, l'aidera à briser ces chaînes dans sa vie future.
2
Ce jour-là, tout était déjà mis en place. Si bien que le village avait l'habitude de célébrer à longueur de journée de telles cérémonies, ce n'était pas pareil ce jour-là. Toutes les filles refusèrent de danser pour rendre l’évènement captivant. Elles manifestaient toutes, leur désarroi face à cette soudaine situation d’Adissa. Celles qui allaient à l’école se sentirent agacées et fatiguées de vivre toujours les mêmes horreurs.
Le regard du père d'Adissa devint serré. On appela Biba la quadragénaire qui à l’habitude de rassembler les filles du villages pour les cérémonies de mariage.
__ Pourquoi les filles ne sont pas rassemblées aujourd’hui pour la danse de *guirima* ? Demanda le père d’Adissa avec fureur sans même d’abord laisser que la dame s’assied.
__ Papa Adissa, il n’est point caché pour personne que ces filles ne veulent pas de ce mariage. J’ai tout essayé, mais leur tristesse exprimait tout ce qu’elles ressentent. Depuis un certain temps, elles commencent par avoir des idées différentes et je leur comprend un peu, avait répondu calmement la représentante des filles.
Mais le père d’Adissa ne comprenait pas ce que Biba avançait, ils s’assirent tous, se firent face. L’un sur la natte et l’autre sur un tabouret. Il resserra sa chemise * hagbala* dont les flancs floquaient le sol, puis cria-t-il :
__ Qu’est-ce que tu veux dire par ‘’ avoir des idées différentes ‘’? Faites attention, ne laissez pas nos enfants nous prendre comme leurs enfants. Tout ce qu’on fait, c’est pour leur bien et c’est pour leur montrer aussi le chemin car demain, ce ne sera plus nous, mais plutôt vous et après, c’est eux. Il faut donc qu’on leur montre le chemin que nous-mêmes, on nous a montré.
_ Je suis d'accord avec toi papa Adissa. Mais comme tu le sais, on dit souvent que quand le rythme du tam-tam change, les danseurs doivent aussi changer de cadence. Je ne suis pas contre le mariage d'Adissa, mais je voudrais qu'on comprenne tous sa décision de continuer à étudier car elle est totalement différente. Notre équipe de danse a parcouru plusieurs pays en Afrique et dans le monde. On est allé pour des danses au Nigéria, en Afrique du Sud, en Belgique, etc.. Mais je peux taper la poitrine et dire que ce qui la motive en ce moment, ce n'est pas le foyer, mais c’est comment faire pour devenir une grande femme comme celles qu’on rencontre dans les pays extérieurs et moi ça me réjouit parce que le jour qu’elle le deviendra ce serait un bonheur pour nous tous. Il faut qu'on puisse revoir maintenant certaines choses, surtout en ce qui concerne les femmes.
Biba qui parlait avec conviction et assurance pensait pouvoir convaincre le vieillard mais c’était en ce moment même que le maître de la maison devint fâché et méconnaissable.
__ Fallait me dire depuis que c’est toi qui leur encourage dans ce dérapage. Depuis quand une femme a même commencé par décider de ce qui est meilleur pour notre société ? D’ailleurs c’est moi qui perd même mon temps avec toi. J’ai déjà décidé, ce mariage aura lieu et personne ne peut le changer. Tu peux te lever tranquillement et partir de ma maison. ‘’Grande femme’’, on ne m’a pas appris cela moi, c’est dans télé on voit ça.
La représentante n'était pas surprise. Elle savait bien que papa Adissa était un homme rude. D'ailleurs elle s'y attendait bien. Elle se leva donc tranquillement comme le demanda son hôte mais avant de partir et tout en restant debout elle tenta de lancer un dernier mot :
__ D'accord je pars comme tu l'as dit, mais n'oublie pas que le rêve peut permettre à un homme de déplacer tout seul toute une montagne. Adissa a un rêve et je suis sûre qu'elle ira jusqu'au bout de son rêve. Elle est une fille pas comme les autres. Elle rêve grand, elle aspire grand. Jamais on avait vu une fille pareille dans ce milieu. Si tu penses que c'est le mariage qui est mieux pour elle, tu comprendras avec le temps qu’aucun souhait ne se réalise sans volonté.
A ces mots, elle tourna dos au maître de la maison et prit son chemin.
Le père d'Adissa resta silencieux pendant un moment , mais toujours intransigeant. La décision restait la même et personne ne pouvait la changer.
Comme s'il venait de gagner une guerre, le maître de la maison replia sa natte et entra dans sa chambre avec colère et confiance.
Le lendemain, jour de mariage, le village était trop calme. De toute façon, il n'y avait pas de l'ambiance comme les fois précédant surtout lorsqu'il s'agit du mariage. Les enfants, les filles qui donnent goût au mariage sont tous attristés par la situation d'Adissa.
Mais une chose est sûre, le père d'Adissa s'en foutait. Pour lui, c'est le mariage ou le mariage.
3
Comme il était d’usage, seuls les hommes avaient le droit de faire des décisions. Aucune femme, aussi vieille soit-elle, n’avait le droit de dire un mot face à la volonté d’un homme. C’est ainsi que face aux cris de la jeune fille, sa mère resta immobile car impuissante.
Adissa devras donc mettre terme à son rêve, prendre ses effets et venir servir en tant que troisième femme chez Kôra. Malgré les larmes, les cris, les douleurs que ressentaient la jeune fille, rien n’eut fait. Cependant, un mois après ce mariage, le rêve de la jeune fille le brisait toujours le cœur.
Un beau jour, alors qu'il y a encore des nuages, Kôra le mari des trois femmes s'était déjà levé. Avec un regard pensif, il sortit de la chambre et vint s'asseoir juste à coté de la porte sous un tabouret, faisant face à la cour de la maison, et commença par afficher un visage soucieux. Regard emporté et une tête ailleurs. Qu'est ce qui pouvait donc amener le maître de la maison à ne plus avoir du sommeil alors que juste quelques mois avant, tout était rose ? C'est bien sûr ce que l'on pensait : l'affaire Adissa.
L'on pouvait donc le voir assis, une main gardant le menton , l'autre, déposée sur un genou plié. Le maître de la maison, adossé au mur sur un regard éloigné, continuait toujours avec ses pensées farfelues que lui même n'arrivait pas à comprendre. Au bout d'un profond silence qui faisait entendre les battements des mouches, on pouvait entendre une voix faible, funeste et ennuyeuse. C’était sans doute Kôra qui parlait ;
- Ummm, est-ce que c'était vraiment évident de se marier à cette jeune fille ? Est-ce c'était vraiment un bon choix pour moi, une femme qui n'a, en même temps, rien d'une femme ? Toujours des idées ailleurs, des ambitions différentes, des discours que moi même je ne comprends pas. Comment pouvons nous continuer ainsi ? Pas même d’idées sur le foyer.
Ou bien c'est moi qui ai fait le mauvais choix, devrais-je la laisser qu'elle grandisse pour savoir réellement si elle était faite pour le ménage ? Mais non, ce n'est pas ma faute car c'est notre tradition. Mais cette fille n'a rien d'une femme. Elle ne me respecte même pas comme une femme respecte son mari.
Elle n'arrête de me dire que j'ai plusieurs femmes, que c'est pas bon, que je pense comme un taré, que j'ai la moindre idée du monde, fille de 16 ans, hein ? Non avec cette corpulence que j'ai, je ne peux pas continuer à tolérer cela, elle risque de m'emmener dans un monde que je ne connais pas, pourtant s'il y avait un autre monde, mon père me l’aurait prévenu. Je ne crois pas à ses idées inouïs que moi-même je n’arrive pas à concevoir.
D'ailleurs même, c'est moi qui suis patient, sinon, depuis qu’on s'est marié il y a de cela un mois, elle refuse toujours que je la touche. La dernière fois que je lui ai forcé pour qu’on passe à l’acte, c’était le jour même du mariage. Je voyais du sang coulé de l’intérieur de sa partie génital. Depuis ce jour elle n’a plus jamais accepté.
Mais aujourd'hui trop c'est trop, je dois connaître réellement sa position. Ça ne peut pas continuer ainsi. Soit elle change, soit elle part de ce moi, je ne suis pas aussi dupe que ça.
Pendant qu'il prononçait ces dernières phrases, Adissa de son côté, n'arrivait pas aussi à trouver du sommeil. A la même heure que Kôra, très tôt ce matin, elle même, avec un article intitulé '' réveil féministe '' dans les mains, commença par penser de son avenir, de son rêve qui lui brise actuellement le cœur.
Couchée au lit, visage regardant le ciel, elle posa après un petit bout de silence, l'article sur sa poitrine. Tête pensive, regard vers Dieu, elle commença par couler des larmes. Les larmes coulaient par terre, l’une après l’autre. Elle sentit une tristesse indescriptible, elle se voyait éloigner de son chemin, de son histoire qu'elle veut écrire. Elle se sentit triste, très triste. Puis d'une voix très lugubre, elle se posa des questions sans réponses:
- Est-ce ma qui est devenue ainsi ? Moi Adissa, cette enfant qui rêvait des étoiles, de la lune pour mon pays mais qui subitement, renversée par ceux en qui j’avais confiance? Tout juste parce que je suis une fille ?
Est-ce que comme cela, je vais tourner dos à mon rêve, moi qui portait mon uniforme chaque petit matin pour aller battre des records à l'école ? Ma société est pourrie, elle ne veut pas des femmes mais des hommes, elle ne veut pas des ambitieux mais des polygames, elle ne rêve même pas des constructions mais des foyers, elle ne rêve pas de développement mais des enfants, des enfants et rien que des enfants.
Je vois, j’ai grandi et je ne peux pas faire cela tout en restant ici, non. Non, ici n'est pas ma place. Il faut aller à l'école. Je suis ici depuis environ un mois maintenant, et j’ai rien gagné . L'école a déjà repris il y a deux semaines, depuis le 18 dernier. Que faut-il faire ?
Un désire inestimable de reprendre le chemin de l'école envahit l'esprit d'Adissa. A ce moment, tout ce qu'elle voulait c'est de reprendre rapidement les bancs pour poursuivre son rêve, après un mariage douloureux. Elle sait qu'elle en est capable. D'ailleurs c'était elle la Première à l'examen du BEPC dans son collège.
Adissa, en se couchant, avait déjà tracé son plan, celui de fuir de cette maison.
A la tombée de la nuit, la jeune fille fit un petit bagage, c’était dans une demie bassine, puis comme si elle allait au puits, elle disparut de la maison. Tout le monde était là, mais ne savait pas que la jeune fille s’envolait.
Il était 20h de la nuit. Mais où irais t-elle, chez ses parents ? Non, elle savait que ce n'était pas possible. Elle ne savait même pas où aller en ce moment, elle était complètement perdue. Tout ce qu'elle voulait était de quitter d'abord la maison de Kôra et de préparer son retour dans les bancs de l'école . A un moment donné, elle fut fatiguée. Elle était assise à côté d'une construction abandonnée, un peu reculée des habitations pour mieux penser et réorienter sa nouvelle aventure.
- L'école a déjà repris il y a deux semaines, se disait-elle avec un regard méprisant.
- Que faire ? s'interrogea.
Regard toujours affligé, cœur détérioré, elle se sentit bannir du monde.
Mais c'est là elle va rapidement découvrir une superbe idée . Ainsi, Adissa se rappela qu'elle devrait faire la classe de 2nd et que son collège, collège de Kpara où elle fréquentait depuis et qui est dans ce même village où il y a son père, son véritable cauchemar, n'avait pas de second cycle. Ainsi, tout élève qui désire poursuivre son cursus scolaire devrait quitter le village de Kpara pour rejoindre la ville de Sébarou où se trouve le plus grand collège. Kpara étant donc un village de la commune de Sébarou.
Adissa se sentit soulager de cette merveilleuse idée. Elle devrait donc rejoindre la ville qui est à 70 km de son village, ainsi elle pourrait oublier tous ces revers qui se sont produits et se concentrer sur ses études, loin de ses parents, et loin de ce maudit village. Alors il faut rapidement préparer le voyage. Que faire ? Comment faire ? Chez qui rester ? Voilà même la vraie question, chez qui rester en ville. Vu qu'on ne peut plus compter sur Papa, ni sur un oncle. Eux tous vont s'allier du côté de la tradition pour réclamer son retour au mariage.
- Merde je dois réfléchir, se pressait Adissa en tapant sur son front avec sa main droite.
Puis au bon d'un petit moment, elle s'arrêta brusquement comme si elle venait de trouver une idée. Elle afficha un visage très sérieux en faisant rapprocher ses paupières à ses yeux, puis son index un peu levé, elle dit :
- Attends ! Attends ! Il y a Koubourath, ma meilleure amie. Oui Koubourath, je dois chercher rapidement où elle est.
Adissa avait raison, Koubourath sa meilleure amie, était une fille qu'elle a connue en classe de 6ème. Koubourath connaissais déjà très bien la ville. En effet elle a grandi avec son père qui travaillait à la mairie, en ville. Mais quand elle obtint le Certificat d'Etude Primaire appelé CEP, son père lui amena au village pour connaître sa grande mère lors des vacances. Mais la grande mère était tellement impressionnée par les qualités morales de la petite qu'elle a demandé à son fils de laisser sa petite fille passer au moins une année avec elle.
Chose que Benoît le père de l'enfant, accepta mais avec une condition : sa fille doit continuer l'école et devrait être épargnée des habitudes périlleuses du village comme le mariage. Benoît aimait bien sa mère, il y avait donc une relation filiale qui liait ces deux hommes.
C'est donc ainsi que Koubourath connut le village et exactement, dès la rentrée qui suivit, la grande mère l'inscrivit en 6ème.
Koubourath était elle aussi une fille brillante à l'école. C'était l'amie avec qui, Adissa partageais le plus d'idées. Elles se disaient tout et ne se cachaient rien : des rêves, des ambitions, de la joie, et toute grande chose du monde. Ce n'est donc pas étonnant si elles toutes avaient approximativement les mêmes rêves.
Pendant donc que Adissa rêvait de travailler dans la justice un jour, Koubourath elle aussi, rêvait de devenir avocate pour défendre le monde dans des affaires pénales, civiles et sociales.
Elles étaient petites mais elles avaient les plus grands rêves et objectifs de ce monde malgré leurs âges .
Faut-il alors rapidement appeler Koubourath pour connaître sa position ? Oui c'était exactement ce que Adissa comprit. Mais comment appeler Koubourath alors que ni Koubourath ni Adissa n'avaient en possession d'aucun moyen de communication ? Que faut-il faire, écrire une lettre ? Non, c'était trop tard, l'école avait déjà commencé. D'ailleurs écrire une lettre pour donner à qui, sachant qu'Adissa en ce moment, ne pouvait plus apparaître à n'importe quel coin du village avec ses bagages en main de peur qu'elle ne soit interceptée par un membre de la famille.
Elle s'arrêta encore une minute, affichant un visage pensif. Les yeux longuement fixés sur un objet qui se trouvait devant elle comme si elle cherchait à savoir de quoi cet objet était fait, Adissa trouva en même temps une idée. Elle décida de se rendre rapidement chez la grande mère de Koubourath étant donné que cette dernière communiquerait régulièrement avec le père de Koubourath via un téléphone mobile. Adissa avait l'habitude d'aller chez la vieille, surtout quand Koubourath était là. La vieillarde aimait bien les deux jeunes filles. Elle les aimait authentiquement, l'une et l'autre. Elle ne cachait jamais son admiration devant les filles laborieuses et respectueuses. Elle leur disait toujours qu'elle pouvait tout perdre mais de garder au moins ces deux valeurs intactes.
Adissa se sentit de nouveau soulagée. Alors à 20h- 21h environ, elle se rendit de manière inobservable chez la grande mère. A son arrivée, la grande mère était encore dans la chambre, en train de réarranger les tas d'habits, d'objets de longue date qui, chaque jour, encombrent la chambre.
- Bonsoir mémé, salua la jeune fille avec un visage près à larmoyer.
- Eh Adissa ma fille, comment tu vas ? Ça fait vraiment longtemps, cria la vieillarde de l'intérieur de la chambre, avec une voix que l'on percevait faiblement à l'extérieur.
Elle n'avait même pas d'abord donné le temps à la jeune fille de prendre un peu de réconfort pour répondre, puis enchaîna-t-elle en se dirigeant vers la porte :
- On ne s'est plus vu depuis ce triste mariage qui a secoué le village. Quand l'autre fois, on s'était rencontré avec ton père, je lui avais poliment dit qu'on pouvait éviter cela mais il me répondit farouchement que la tradition c'est la tradition.
Jusque-là Adissa ne dit rien. Elle resta silencieuse jusqu'à ce que la vieillarde sortit de la chambre. Mais à sa vue, la grande mère fut grandement surprise :
- Adissa, c'est toi, comment ça ? Tout va bien ? En plus avec un bagage ?
Larmes aux yeux, la jeune fille tentait de parler mais rien ne sortait. Ayant attendit une réponse immédiate mais en vain, la vieillarde bondit à son secours :
- Vient là ! Assieds-toi toi et dis moi ce qui se passe, la consola la grande mère en essayant de prendre les effets d'Adissa de ses mains et en lui conduisant vers le petit tabouret déposé à l'entrée de la porte.
- Dis-moi maintenant Adissa, qu'est-ce qui te saigne le cœur ? Est-ce Kôra, l'homme que ton père t'a donné en mariage ou bien c'est le besoin de revoir ton amie Koubourath ? Demanda la vieillarde qui sentait une profonde déchirure chez la jeune fille.
- Mémé, s'il te plaît, aide moi. Je veux retourner à l'école, répondit la jeune fille avec la même voix qui pleurait.
- Retourner à l'école ? Tu sais que avec ton niveau d'étude, tu ne peux plus continuer qu'en ville non ? C'est d'ailleurs pourquoi Koubourath n'est plus ici depuis environ trois semaines. Son père était venu ici en personne pour la chercher et je pense que l'école serait déjà commencée depuis les trois semaines..
- Non, deux semaines, cria soudainement la jeune fille qui ne laissa pas la vieillarde terminer sa phrase.
- Ah bon deux semaines ? Ok maintenant comment penses-tu faire ? D'abord tu as quitté où comme ça ?
- J'ai quitté l'enfer de Kôra depuis midi. Mais personne d'entre eux ne sait où j'irais ni où je suis actuellement. Grande mère, je jure que personne ne m'a vu en venant ici. Grande mère, je veux vraiment étudier et aujourd'hui, j'ai besoin de ton aide plus que jamais, clarifia la jeune fille qui commençait par montrer un visage détaché.
La grande mère imagina déjà les idées d'Adissa. Elle la connaissait très bien. Elle sut que même après ce désastre de mariage, la jeune fille ressentait toujours comme depuis le premier jour, ce désire démesuré de continuer à étudier et d'être toujours brillante à l'école.
- Tu veux rejoindre Koubourath en ville, c'est ça ?
- Exactement mémé, c'est exactement cela, répondit-elle avec sursaut.
- Ton père est-il au courant que tu as quitté la maison de Kôra ?
- Peut-être que Kôra ira l'informer demain. Mais mémé, ça ne me regarde pas. Ils sont tous deux des ombres et veulent forcément que ce grand village devienne une ombre aussi. Surtout mon père. Mémé et vous vous taisez.
- Eh ma fille que puis-je faire devant ces hommes ? Si je parle maintenant, ils vont dire de me taire, que je suis femme. Ah ici les femmes ne parlent pas hein sinon que quand et où les hommes le veulent. C'est comme ça j'ai vécu jusqu'à mes 92 ans aujourd'hui. On espère juste qu'un jour, cela va changer, répondit calmement la vieillarde qui en parlant, faisait certaines grimaces prouvant qu'elle ne pouvait vraiment rien faire devant la rigueur et l'intransigeance des hommes.
- Mémé c'est vraiment une véritable prison, et ça ne peut pas demeurer ainsi. Mais, actuellement ce que je veux le plus, c'est de rejoindre rapidement la ville et de reprendre mes études avant que mon père ne me voit et ne m'intercepte.
- Que vais-je maintenant dire au père de Koubourath si je l'appelle, vu qu'il ne te connaît pas trop, lui ?
- Tu dois trouver des mots pour le convaincre grande mère. Je te fais vraiment confiance.
La grande mère gratta un peu la tête. D'une part, elle devrait prendre le risque d'aider Adissa à quitté rapidement le village pour la ville sans que personne ne sache, d'autre part, elle devrait trouver une place à Adissa chez son fils Benoît. Elle savait que ce serait un peu compliqué de faire une place à Adissa en ville chez son fils mais elle comptait sur l'engagement de Benoît à protéger les filles à l'école et à leur propulser en terme d'éducation . Elle comptait aussi sur la bonne moralité d'Adissa qui plairait certainement Benoît car tout comme sa mère, Benoît aussi n'admire le plus chez une fille, que son labeur et le respect qu'elle prône autour d'elle.
Alors la grande mère prit le téléphone, l'alluma, et lança l'appel sous le regard paniquant d'Adissa. Puis après seulement deux minutes, un accord était trouvé, Adissa va bientôt quitter le village pour rejoindre son aime Koubourath en ville.
La sagesse de la grande mère était au rendez vous. Elle présentait Adissa comme une pièce d'or sur un diamant.
On pouvait voir la jeune fille hocher la tête avec un petit sourire au calme à chaque fois que la vieillarde la valorisait pour convaincre son fils.
De son côté en ville, après l'appel téléphonique, Benoît appela sa fille Koubourath qui était dans sa chambre, depuis des minutes, en train de parler avec le stylo sur le troisième exercice de mathématiques que leur enseignant leur avait déjà donné. A l'appel de son père, il jeta rapidement le stylo et courut vers le salon :
- Tu connais quelqu'un qu'on appelle Adissa ? Demanda Benoît, lui qui sait désormais tout, mais qui décida de demander intelligemment à sa fille pour s'en rassurer.
Koubourath fut étonnée, mais en même temps, son visage s'éclata.
- Oui Papa, je connais très bien Adissa. C'est d'elle je te parle souvent. Au village, c'était ma meilleure amie et elle était toujours première de notre classe. Cette année depuis que les cours ont repris, les professeurs appellent son nom à plusieurs reprises, puis on dit qu'elle n'est pas encore arrivée.
- Hum, répondit papa Benoît en réajustant ses lunettes et en hochant plusieurs fois la tête.
- Papa qu'est-ce qui lui est arrivé ? Demanda Koubourath qui tout d'un coup, remplit d'inquiétude.
- Non rien de mal. On m'a dit qu'elle va lui aussi fréquenter ici, et...
- Et elle va rester ici ? Demanda encore Koubourath avec des bras prêts à célébrer.
- Oui, répondit tranquillement son père.
Koubourath sauta de joie.
- Mais, j'espère qu'elle sera signe de respect et montrera de l'amour pour le travail bien fait.
- Papa, je vous assure que vous ne regretterez pas la présence d'Adissa dans cette maison.
Après cette phrase de Koubourath, les deux hommes se fixèrent longuement les yeux, puis après avoir hoché deux fois la tête, Benoît d'un signe de la main, dit à sa fille qu'elle peut retourner dans sa chambre .
Le lendemain matin, très tôt ce dimanche, Benoît sortit sa moto de sa chambre, partis au village et Revint avec Adissa.
Koubourath était en train de nettoyer la chambre. A la vue d'Adissa guidée par son père, elle jeta ce qu'elle a en mains, couru pour embrasser Adissa et l'aider à prendre ses effets. Adissa lui même, tellement fière, tellement enthousiasmer que les deux jeunes filles ont d'abord passer plus d'une minute à s'embrasser, à se toucher, à rire, elles se voyaient revivre déjà leur moment d'antan.
Benoît se dirigea tranquillement dans la chambre. Une fois au salon, il s'assit dans l'un de ses fauteuils, menton posé sur la main , il commença par afficher un visage souriant. En attendant que les deux jeunes filles entrent dans la chambre, il profita pour prendre un verre d'eau toute fraîche.
Koubourath emmena directement Adissa dans sa chambre. Le papa Benoît leur regardait mais n'avait rien dit. Pour lui, c'était logique : Koubourath et Adissa resteront ensemble dans la même chambre. Koubourath montrait déjà avec excitation à Adissa les cours qu'ils avaient fait, de comment son nom est appelé chaque jour en classe, de leur professeur de mathématiques qui, avec sa tête un peu grande, ne leur laissait pas respirer avec des exercices, de l'excitation que les gens ont suite à cette nouvelle matière qu'est la philosophie, de leur professeur d'anglais qui leur a déjà dit de chercher dix verbes irréguliers avant de venir le lundi.
Les deux filles étaient donc excitées quand ils entendirent la voix de leur père les appeler au salon. Elles se précipitèrent toutes pour venir au salon. C'était Papa Benoît :
- Adissa, as-tu des fournitures ? Demain déjà lundi, vous avez cours et tu dois commencer maintenant. Tu es déjà assez en retard, parla tranquillement Benoît devant Adissa et Koubourath.
- Non papa, je n'ai pas de fournitures, répondit doucement Adissa.
- Ok as tu un kaki uniforme ? Demanda encore Benoît
- Non, celui que j'avais je n'ai plus eu l'occasion de le prendre de mes parents.
- D'accord c'est pas grave.
Benoît regarda discrètement la taille d'Adissa et hocha la tête. Puis quelques minutes après, il a dit à ses filles qu'il reviendrait dans peu de temps.
Koubourath profita de cette courte absence pou parler à son amie de ce qu’elle pense de la ville :
- Tu sais Adissa, je pensais que cette idée de réduire la femme à néant, de la manquer de respect au point de ne pas faire la différence entre elle et un objet, était seulement au village. Mais depuis que je suis arrivée ici en ville, j'ai découvert que c'est pareille partout. Peut-être qu'ici même en ville, c'est plus pire qu'au village. En fait c'est toute notre société qui est pourrie, polluée par l'arrogance des hommes. Tu sais quoi, j'étais surprise quand la dernière fois, une connaissance de mon père était venue le rendre visite, mais avec des pleurs, avec des doutes sur son avenir avec un cœur qui saignait, juste à cause de l'arrogance d'un seul homme.
Koubourath s'arrêta quelques secondes mais Adissa impatiente, demanda la suite :
- Qu'est ce qui s'était passé ?
- La dame travaillait dans une grande entreprise énergétique ici en ville. Mais parce qu'elle s'entretient bien, tous les hauts cadres de l'entreprise veulent la faire connaître de gré ou de force leurs lits. Elle dit qu'avant, c'était le DG de l'entreprise qui la poursuivait, et qui la menaçait de lui corrompre au cas où elle refusait ses avances. Elle a fini par cédé. Puis tu sais quoi, quelques jours après c'est maintenant au tour du PDG de l'avoir sur l'œil.
- Le PDG encore ?
- Oui le PDG. Laisse moi finir de te raconter, tu n'imagines même pas la suite. Tu sais, le PDG a commencé par courtiser cette même dame que son DG connaît intimement. Pourtant, c'est une dame mariée. Le pire, c'est lorsque le PDG lui a donné un rencard pour la première fois dans sa maison, mais ce jour était tellement chargé pour elle qu'elle n'a pas pu honorer à l'invitation. Déjà le lendemain, elle constate soudainement que son nom ne figure plus de la liste des travailleurs. Elle demanda d'explications auprès du secrétariat, mais ceux-ci lui disent que c'était un ordre venant d'en haut. Tu vois ça Adissa, une telle exploitation ?
Adissa regardait l'environnement sans pu rien n'y dire. Koubourath se donna le plaisir de lui raconter un autre cas :
- Tu sais, mon père est le Premier Adjoint au Maire de cette ville. Pour cette raison, beaucoup de femmes viennent ici manifester leurs mécontentements face à ce qu'elles subissent dans leurs différents lieux de travail et aussi leur ardent désir de voir la mairie implanter des cabinets de dénonciations dans la ville. Elles veulent vraiment l'aide de la mairie.
Adissa hochait la tête. Koubourath continua :
- C'est aussi comme ça un jour, une femme enseignante débarqua ici avec colère.
A un moment donné, j'entendais sa triste voix de quelques mètres de ma chambre. Je me tâcha de bien contrôler mes mouvements afin de ne faire un minimum de bruit. Je l'entendais donc faiblement dit : '' En tant que filles, on brise nos rêves. Dans les foyers, on nous empêche de s'affirmer. Dans les administrations, on nous marginalise. Dans les lieux de travail, on nous chosifie. Dans les places importantes du monde, on nous bannit. Pourtant c'est une planète appartenant à deux êtres humains : homme et femme.
Ils savent bien nos valeurs, notre utilité, ils savent bien que l'une de nos plus importantes valeurs, c'est de construire une famille, se sentir protéger sur les bras d'un homme, avoir un enfant, une fille, un garçon, et enfin devenir responsable en apportant sa pierre pour la construction de son pays, du monde. Alors on l'a su, on a bossé, très dur et nous voilà maintenant en train de bâtir le pays, on s'est aussi marié comme il est de coutume, ils savent bien cela les hommes, ils le savent très bien pourtant ils essayent de nous corrompre, de nous aider à faire des erreurs, après c'est pour dire que nous sommes des démons, des emmerdeuses alors que c'est vous des monstres, des déstabilisateurs.'' Je voyais mon père chercher des mots pour la rassurer, je le voyais dans un impasse, affichant un visage pleines de réflexions.
Tu vois toutes ces sauvageries, Adissa ? La femme est-elle un instrument jusqu'à ce point ? Vraiment je suis dégoûtée de ma société, des hommes qui m'entourent. Aujourd'hui on est pas encore trop adultes, mais si rien n'est fait, si on n'y prend pas garde dès maintenant, on sera nous même victime de cette psychose un jour. Qu'en penses tu Adissa ?
- J'ai un plan, mais il ne fonctionnera pas tant qu'on ne devienne encore des figures.
Quelques minutes après, le papa Benoît revint aves des fournitures, de sac au dos et d’un uniforme similaire à celui de Koubourath. Tout ça pour Adissa.
Le lendemain déjà, les deux jeunes reprirent le chemin de l’école.
4
Deux années après, les deux jeunes filles étaient déjà en terminale et s'apprêtaient donc pour l'examen du Bac. Au collège, tout le monde était fier d'Adissa. Les enseignants et l'administration étaient admirés par son travail.
Au village, on apprend que le père d'Adissa ne sais toujours pas exactement où Adissa peut être. Après avoir appris que sa fille avait quitté la maison de Kôra, le vieillard avait dit que '' rien ne lui regarde pas ''.
- Moi j'ai fait ce que je devrais faire, avait lâché depuis, le père d'Adissa.
Seule la mère d'Adissa ne trouvait toujours pas sommeil. Elle ne savait pas où s'était réfugiée sa Benjamine ni comment est-ce qu'elle vit.
Parfois Adissa aussi y pense sa mère. La dernière fois que Koubourath l'avait vu très triste au point où elle n'avait même pas pu prendre le dîner, c'était bien-sûr à cause de cette longue absence sans plus jamais revoir sa mère. Après le dîner ce jour Koubourath la rejoignit dans leur chambre :
- Pourquoi n'as-tu pas mangé aujourd'hui ?
- Rien, je n'avais pas faim, répondit calmement Adissa.
- Non, c'est pas vrai Adissa. Tu devrais me dire ce qui ne va pas, tu sais qu'on est ensemble depuis longtemps mais je ne te reconnais vraiment pas aujourd'hui.
Un petit moment de silence s'imposa. Koubourath voulait à tout prix savoir. On pouvait aussi voir Adissa toujours assise dans sa morosité.
- Tu sais, je pensais à ma mère. Je pense à ce qu'elle ressent actuellement. Mon père serait en train de la malmener encore, comme toujours, alors qu'elle n'en est pour rien. Elle était la seule à me comprendre, à m'aimer vraiment, la seule avec qui je pouvais parler, avec qui je pouvais rire, celle qui comprenait chacune de mes douleurs. Oh maman, dommage !
Avant que son amie n'approche, les larmes d'Adissa n'avaient pu être retenues.
- C'est bon, arrête de pleurer Adissa, disait tristement Koubourath tout bas.
Koubourath eut de compassion pour sa meilleure amie. Elle n'a jamais aimé voir Adissa blessée. Elle devint souple, triste et ses yeux devinrent rouge aussi :
- Tu sais Adissa, c'est le prix à payer quand on aspire à la grandeur, à l'indépendance et à la liberté. On doit vraiment l'accepter.
Adissa souleva la tête et regarda son amie parler. Mais celle-ci, d'un ton faible et opaque, continua :
- Moi, j'ai perdu ma mère sur accident quand j'étais toute petite. Durant ce moment d'accident, je voyais tout le temps mon père molester ma mère a chaque fois qu'il revenait du travail. Mon père en ce moment, était un homme trop cruel envers les femmes. D'ailleurs il buvait, fumait, puis une fois déjà qu'on sentait son retour, on savait tous que la maison prendrait feu pendant un moment. Ma mère savait déjà qu'elle avait à faire à un monstre, un monstre prêt à l'abattre et à l'enterrer. Jamais de ma vie je n'avais vu un homme prendre autant du plaisir à déchirer le corps d'une femme tel le faisait mon père. Ma mère n'avait pas besoin de commettre un acte offensif pour que le monstre s'abatte sur elle. Il suffisait seulement que ma mère tarde d'une seconde à ouvrir la porte à mon père qui revenait toujours à 00h ou 01h du matin, tout saoulé. Avant que ma mère ne dise toujours son premier mot, c'est au bon milieu de sa joue qu'elle entendait le coup fatal d'une main de l'extérieur qui la mettait toujours dos à dos avec le sol. Avant qu'elle ne se lève, le monstre entrait déjà à l'intérieur, puis c'est au bout d'une défense pitoyable que ma mère se voyait démolir le corps. Personne n'était là pour l'aider. Seule moi, petite fille que j'étais, restait dans un coin pour voir l'enfer que vivait ma mère. Je pleurais, je criais, je crachais, je vomissais mais je ne pouvais rien faire de plus. Je devrais moi-même faire attention face à certains coups de mon père qui passaient et repassaient juste à côté de mon visage et tout juste en haut de mes cheveux. Ma mère après qu'elle se voit respirer un peu d'air, courait vers la porte de sortie, tout en pleurant. Mais souvent, c'est après que du sang s'est rouillé dans son visage, après que de grosses blessures se sont installées. Ma mère faisait pitié et mon père était inhumain.
Mais tu sais quoi, mon passage au village m'a fait découvrir autre chose plus pire et plus révoltante. Ainsi ma grande mère m'a fait savoir que je devrais être la troisième enfant de ma mère. Mais la brutalité et la violence de mon père l'a fait perdre ses deux premières grandes grossesses qui se sont traduites en de fausses couches. C'est dans ces moments difficiles, dans cette atrocité que ma mère a été percutée par un véhicule. Donc avant qu’elle ne parte même dans ce monde de silence, elle a d'abord connu la mort sous le toit de son propre mari. Voilà pourquoi je suis l'unique enfant de ma mère défunte et de mon père sauvage.
Mais une chose m'a surpris, a surpris ma grande mère et a surpris tout le monde. Mon père n'est plus l'homme qu'il était hier. Il n'est plus ce monstre, ce sauvage, cette bête, mais aujourd'hui mon père est devenu l'homme le plus humanisant du monde. Après le départ prématuré de ma mère, mon père a commencé par s'occuper de moi : me nourrir, me laver, me vêtir, me soigner. Tout par lui-même. Il m'emmenait souvent dans son lieu de travail, là où étant petite, je me chiais dessus. Je voyais mon père devenir fatigué de moi, il commença par montrer un visage fatiguant, décourageant. Il commença par avoir besoin d'aide, besoin d'aide d'une mère, d'une mère comme la mienne. Finalement, mon père comprit, il comprit que c'était une erreur, une très grosse erreur de brutaliser et de morceler la chaire et le corps de ma mère.
Mon père comprit et tu sais quoi, il jugea de ne plus jamais épouser une autre femme jusqu'au dernier jour de sa vie sur terre. Il jugea aussi de ne plus jamais boire, ni fumer jusqu'à son dernier souffle. Il jugea également de m'élever, de me protéger et de faire son possible pour que dans ma vie, rien ne me manque. Ce que j'aime chez mon père, c'est un homme de parole. Jusque-là, mon père tient bon, il n'a jamais lâché à aucune de ces promesses et il en a jamais eu l'air de lâcher. C'est vrai, mon père a été très violent et cela a laissé des traces que rien au monde ne peut effacer : j'ai fait face aux douleurs très jeune, j'ai perdu ma mère, une personne que rien au monde ne peut remplacer. J’ai grandi sans connaître trop longtemps la chaleur d’une mère et je vais désormais mourir plus jamais la connaître, sans jamais la revoir. Je sais ce que ressens souvent, des pensées qui m’arrivent souvent. Lorsque tu perds une mère, tu perds une partie du bonheur. Et peut-être même qu'elle serait en vie si mon père avait été tendre et humanisant envers elle. Ne parlons pas des grossesses de ma mère désacralisées, qui elles aussi, auraient pu aboutir à des corps physique comme moi.
Mais aujourd'hui je ne blâme plus mon père car il ne ressemble plus à celui qu’il faut blâmer. Mon père n’est le même. Aujourd’hui, c'est l'exemple qu'il a pu donner en tant que homme dans une société comme la nôtre. C'est ce que je souhaite aussi que tout homme devienne. Que tous les autres hommes suivent l'exemple de mon père : quitter de l'animalité à l'humanité. Ainsi on pourrait avoir une planète vivable car il n'y a ni grâce ni longévité dans la barberie. Il n’a vraiment pas un âge pour apprendre et on peut toujours mieux faire tant qu’on le veut. C'est pourquoi j'ai pardonné à mon père et a tout ce qu'il a commis. Je sens souvent ma mère respirer. Du haut des cieux, je la vois souvent sourire. Je ressens parfois les battements de son cœur dans chaque coin de cette maison. Elle est fière lui aussi. Fière de voir ce que son mari est devenu par la suite. Fière de voir que son mari prie pour elle chaque soir. Fière de voir que sa fille a grandi et qu'elle est désormais prête à se battre pour que de tels actes ne se répètent plus dans le futur.
Elle aurait certes dû aimer toucher et vivre pendant plus longtemps avec sa fille, sourire chaque soir derrière un écran et un verre d’eau avec son mari, ce n’est plus le cas. Mais une chose sûre, ma mère ne regrette plus son passage sur terre. Elle s'observe, s'écoute, et s'informe à travers moi, sa fille. Je suis bien équipée, mon père m'aime désormais comme il n'avait jamais aimé, j'ai à mes côtés une amie, la meilleure au monde, je me bats très bien pour être demain une femme artisane. Tout cela, ma mère voit. Elle voit tout et elle est fière. Je t'assure qu'elle est très fière en voyant tout ça. Maintenant il y a un examen devant nous, on doit bien le préparer.
Après tout ce discours de Koubourath, Adissa resta émue, hocha plusieurs fois la tête et salua en silence la résilience de Koubourath.
- Tu n’en m’avais jamais parlé.
- Peut-être qu'aujourd'hui était le meilleur moment d'en parler, répondit Koubourath sagement.
Adissa sentit non seulement un énorme soulagement mais aussi un gouffre de motivation à travers les mots de Koubourath. Son visage devint ravissant. Elle même s'efforça de dire quelque chose sur sa mère. Alors elle regarda le ciel et la terre, respira profondément et commença-t-elle avec un ton bas :
- Parfois je me forçais à sourire, à montrer un visage détendu, juste pour plaire à ma maman, pour qu'elle puisse avoir l'impression que tout va bien. Et puis, en me regardant, elle souriait aussi, alors qu'au fond, elle savait bien ce que nous traversions, elle savait bien que nous survivions. Mais quand des minutes après, elle jetait encore son regard vers moi, elle souriait de nouveau car elle réalisait que le futur c'est moi, sa fierté c'est moi, s'il y a encore un espoir c'est moi, et s'il faut continuer à espérer, c'est toujours à cause de moi.
A ces mots, Koubourath aussi hocha plusieurs fois la tête. Ces mots transpercèrent son cœur, puis enchaîna t-elle :
- On doit réussir pour les prouver qu'elles n'ont pas tort. On doit réussir pour toutes ces femmes maltraitées, pour toutes ces femmes mortes avec leur raison, leur innocence, leurs rêves, leur intelligence.
- Oui, pour toutes ces femmes enfermées dans leurs pensées, dans leurs imaginations de peur de ne pas subir une vilaine tyrannie, ajouta directement Adissa.
C'était clair, les deux jeunes filles étaient leur propre force face aux tournants de la vie. Elles se comprenaient mieux qu'avec quiconque. Ce qui rendait vraiment cette force inébranlable était sans doute les rêves qui les unissaient.
Les jours passent et on s'avançait a grand pas vers la date de l'examen.
Un jour, tard dans la nuit, alors qu'il ne restait que deux jours pour l'examen, les deux jeunes filles dormaient mais Adissa manqua de sommeil.
Pendant que tout le monde dormait, elle avait tranquillement les yeux ouverts. Après quelques minutes, elle se leva, se mit à genoux, yeux fermés, et commença par prier :
'' Père très saint, il n'y a rien qui soit caché sous le soleil qui puisse échapper à ta vue. Père, il est indiscutable que toutes les âmes exposées sur cette terre sont toutes sous ton contrôle. Parmi elles, celle qui arrive à te faire confiance est celle qui a trouvé le meilleur chemin. Je sais que de là où tu es, tu m'entends actuellement, tu me vois actuellement et tu m'écoutes attentivement avec le plus d'attention possible. Aujourd'hui, je ne suis qu'une pauvre fille qui ne fait pas le poids devant une société que j'aime de toute ma vie. Mais ce que je veux, c'est que je sois demain cette grande femme qui va susciter l'admiration et l'attention de toute cette société et du monde entier. Seigneur Dieu tout puissant, je fais aussi cette prière pour mon amie Koubourath qui dort actuellement. Dieu miséricordieux, écoute la voix de ta fille, Amen !
Puis elle se recoucha, posa son bras sur la poitrine de son amie et dormit.
L’examen arrivé, les deux jeunes filles composèrent et finirent toutes en bonne santé.
L'examen s'était bien passé. Adissa ne s'est jamais sentie étrangère dans cette maison de Benoît. Toujours, elle bénéficie du même privilège que Koubourath. Pas de discrimination ni de haine encore moins d’hostilité. Même si Benoît a beaucoup appris de ses erreurs du passé, Adissa présentait cependant des valeurs qui suscitaient toujours admiration.
Koubourath de son côté, toujours c'est la fête avec Adissa. On pouvait tout toucher mais pas à Adissa. Adissa n'était plus seulement son amie, mais elle était telle sa sœur.
Quelques jours après, les résultats tombèrent. Papa Benoît voulait être d’abord le seul à s’y rendre au collège pour voir les résultats de ses filles, collés dans le mûr d’affichage. Mais les deux jeunes filles étaient tellement confiantes qu'elles ont demandé à leur papa d’y aller ensemble. Arrivés sur le mûr, c’était d’abord bousculade sur bousculade que les trois hommes arrivèrent à faire un vis-à-vis avec le large papier blanc collé, où étaient lisibles seulement les noms des admis. Plein d’autres amis, camarades, parents étaient aussi venus voir le fruit qu’a produit leur effort. Le père Benoit ayant un peu du mal à voir, Adissa et Koubourath étaient les deux trop proches.
Avec des yeux bien rivés sur la liste, c'est le nom d’Adissa qui avait été premièrement aperçu.
Koubourath s'empressa de souhaiter félicitations à Adissa, mais celle-ci continuait toujours d’avoir les yeux fixés sur la liste.
Finalement, elle trouva le nom qu’elle recherchait, celui de Koubourath. Koubourath aussi était admise.
Quelle joie ! Les deux jeunes filles étaient admises à leur examen du Bac. Ils revinrent rapidement à la maison. La maison de Benoît se transforma tout d'un coup en une salle de danse, de musique. Elle vibrait de joie, de célébrations. Chacun de son côté, manifestait sa joie en dégageant autant d’énergie qu’il peut.
Mais c'était pas encore fini, la nouvelle la plus excitante n'allait pas tarder. Deux semaines après les épreuves sportives et tout, le directeur du collège général de la ville de Sébarou annonça sur un coup de fil à papa Benoît, que sa fille Adissa était la première à l'examen du Bac de toute la commune de Sébarou et qu'elle devrait rencontrer demain matin samedi, avec les premiers des quatre autres communes qui forment le département, la Ministre du numérique et de la digitalisation, son excellence Madame Donatienne WARI. Durant cette rencontre d'après le directeur, la ministre saluera l'engagement et le travail bien fait de ces jeunes, et leur remettra également des prix afin de les encourager à continuer à se battre pour le développement et la prospérité de leur nation.
Mais quelle coïncidence ! Adissa entendit cela tel un rêve. Koubourath, tellement fière pour sa meilleure amie. Papa Benoît embrassa fortement Adissa, la remercia car pensant que c'est un très grand pas vers les portes du succès.
Pour Adissa, c'était un rêve qui est sur le point devenir réalité. En effet, depuis très longtemps, la jeune fille avait pour idoles, des femmes qui ont réussi. Elle écoutait leurs histoires, apprenait sur elles et lisait des articles sur elles.
Adissa adorait la ministre du numérique, surtout en raison de son jeune âge et de son bagage intellectuel très riche. Elle avait une petite photo d'elle qu'elle avait pris du bureau de son directeur du village. Elle pensait depuis que la ministre était parfaitement l’exemple à suivre, qu’elle aurait quelque chose à l’apprendre, surtout sa réussite dans une société qui adore enterrer les rêves des filles. Voilà aujourd'hui, dans moins de 24 heures, elle pourra rencontrer cette personne qui la donnait espoir et courage en silence.
Tout était prêt pour la cérémonie de l'excellence avec madame la ministre dans la salle de réunion de la mairie de Sébarou. Les lauréats des autres communes avaient déjà faire le déplacement pour se rassembler tous à Sébarou. Parmi eux tous, seule Adissa était fille.
Ce jour là, très tôt le matin, tout le monde se lava et porta les vêtements les plus admirables de son armoire. Adissa et Koubourath avaient porté les robes que leur avait offert leur père au lendemain de leur réussite à l'examen.
Tout était prêt, tout le monde était déjà dans la salle qui était tellement remplie de personnes que même l'air avait du mal à pénétrer. On attendait que la ministre.
Mais tout d'un coup, on voyait un cortège de véhicules qui se dirigeait vers le parking de la mairie. Les yeux du public se tournèrent immédiatement vers le cortège. Tout le monde regardait avec impatience qui veulent sortir des véhicules. Juste une seconde après, ils remarquèrent un homme géant, avec un costume de renommée qui sortit en premier.
Certains villageois et incultes se sont regardés à l'intérieur de la salle et se disaient tout bas :
- Mais, mais, mais….ils nous ont dit que ce serait une dame non, une femme, mais nous on voit un homme là !
D'autres avaient déjà commencé par rire :
- Ahah, moi même je serais étonné de voir une femme ministre dans ce pays là, hein. Ahah j'allais me demander dans quelle société, elle autre, a grandi.
Mais à la surprise de tous, le géant homme, bien costumé se dirigea avec vélocité vers le deuxième véhicule, et s'empressa d'ouvrir avec délicatesse la porte. Aux yeux de tout le monde, s'était bien-sûr la Ministre du numérique et de la digitalisation qui sortait. Elle sortait telle une reine.
Le public était ébloui mais certains étaient ébahis. Le Maire, son premier adjoint le papa Benoît, et l'autorité communale s'empressèrent pour accueillir la jeune étoile que le tout le monde attendait.
La Ministre rentra à l'intérieur, tout le monde s'éleva. Sans qu’on ne leur demanda, les hommes enlevèrent leurs chapeaux. D'un signe de main, elle leur demanda de s'asseoir. Tout le monde s'installa. C'était le moment pour ceux qui ne voyaient pas au front, de profiter de leurs longs cous pour contempler la créature de Dieu, la magie d'une jeune dame dont le cerveau et l'intelligence résonnaient comme un missile prêt à transpercer les mûrs battus en pierres, avec une voix qui transcendait les limites spirituelles.
A chaque deux phrases qu'elle prononçait, c'était sous un tas d'ovations que le public répondait.
A un moment donné de la cérémonie, les mêmes qui se disaient étonnés de son statut de Ministre étaient encore les mêmes à dire :
- Ah cette femme, on peut même la confier tout notre pays et aller dormir dans nos champs. Elle est trop véridique.
D’autres murmuraient :
- Hum c'est une femme qui parle comme ça ? Ah le monde évolue hein .
Quand la ministre parlait des difficultés qu'elle a aussi rencontrées en tant que fille, certains visages étaient au bord des larmes. Elle le disait pour encourager chaque personne présente dans la salle à ne pas abandonner. La ministre parla de comment elle aussi avait des rêves, des ambitions depuis toute petite, de comment elle a souffert, des rejections qu’elle a fait face avant d’y arriver.
Après qu'elle l'a dit, Adissa regarda derrière et ses yeux croisèrent ceux de Koubourath. Elles se sont regardées pendant un moment et toutes deux ensembles, elles hochèrent la tête.
C'était aussi l'occasion pour la ministre d'interpeller l'attention des villageois sur la conservation de certaines idées notoires qui appauvrissent leur société notamment la perception de la femme. Elle parla de l'importance indéniable du genre féminin. Elle leur a fait comprendre la nécessité d'aider les filles et de respecter la femme. La ministre a fait comprendre à tout le public que la société a besoin de tous ses hommes et de tout ce qui l'entoure pour son épanouissement.
Après ces mots, ils passèrent à la remise des prix aux lauréats. Adissa était la première à prendre du prix. A son tour, L’imprésario souhaita respectueusement que la ministre remette ce prix à la jeune fille. La ministre accepta en souriant et éprouva une énorme joie de constater que la jeune fille était parmi les lauréats. Pendant qu’elle remettait le prix à Adissa, on pouvait remarquer ses lèvres qui se soulevèrent légèrement pour prononcer discrètement quelques mots dans les oreilles de la jeune lauréate. Ainsi pouvait-on entendre faiblement :
- Félicitations jeune fille, tu es trop brillante.
Le large sourire d'Adissa ne tarda pas à se manifester après ses mots de gratitude de la part de la femme qui lui a toujours fait rêvé. On la voyait tellement sourire avant qu'on ne l'entendit dire :
- Merci beaucoup madame la ministre, vous êtes tellement gentil.
La jeune Ministre et la jeune fille souriaient toutes les deux avant que le photographe n’enregistre leur photo.
Les prix étaient composés d'un ordinateur portatif et des romans pouvant permettre aux lauréats désormais étudiants de bien se lancer dans leurs études universitaires.
Adissa était aux anges. Elle n'en croyait pas à ses yeux. Qui l'aurait cru ? Elle a d'abord vu son idole tête-à-tête, l'a serré les mains, ensuite a fait une photo avec elle, a échangé brièvement les mots de gratitude et enfin, elle a été filmée par les caméras avec elle. C'était sans doute un moment mémorable pour Adissa qui ressentait vraiment des frissons.
Après la remise des prix, le journaliste de la cérémonie, comme il est de coutume, demanda à l'un des lauréats de venir prendre le micro pour exprimer ses sentiments. Mais après quelques secondes de silence, Adissa se leva volontiers. Tout le public la regardait avec stupéfaction. On entendait aussi des murmures au sein du public :
- Hum cette fille ? Ok allons-y voir, se demandaient certains .
- Avec tout ce nombre, peut-elle parler ? Enchaînaient d'autres.
Mais Adissa n'écouta personne, elle se dirigea tranquillement vers le micro, le prit et d'un ton persuasif, elle commença avec le premier discours de sa vie :
‘’Excellence Madame la Ministre, excellence Monsieur le Maire, Chère autorité communale, distinguées invitées, madame et monsieur, bonjour et bienvenus à cette cérémonie de l'excellence à Sébarou.
Aujourd'hui, c'est avec un cœur rempli de joie et de gratitude que nous disons merci. Merci d’abord à madame la ministre pour sa bonne foi envers les élèves et enfants que nous sommes. Au-delà de l’éducation, la ministre s’est toujours montrée préoccupante face aux maux de notre société. Chaque jour, madame la ministre fait son possible pour satisfaire au moins un besoin urgent de notre nation. Pour certains, ce n'est rien. Mais pour ceux qui savent ce que s'est que construire un pays, cela est largement assez car un pays se construit chaque jour. Sincèrement, madame la ministre, nous vous disons merci.
Nous disons également merci à notre très cher Maire et à toute l’autorité communale pour avoir rendu possible cette initiative. Ils nous soutiennent, et c'est la chose qui nous rend le plus heureux. Comme le disait Nelson Mandela, << l'éducation est l'arme la plus puissante qu'on puisse utiliser pour changer le monde >>. Nous espérons et prions donc que vos efforts quotidiens aideront à réveiller la conscience de toutes les âmes qui s'enlisent actuellement et leur faire comprendre la valeur de cette éducation, la mettre au dessus de tout dans la vie.
Vive l’éducation de notre nation !
Vive le réveil des consciences endormies !
Vive la commune de Sébarou !
Nous vous remercions.
Adissa descendit avec un tas d’applaudissements. Elle regarda discrètement madame la ministre et remarqua que celle-ci la regardait en hochant la tête. Elle lança ensuite un œil sur son père Benoît qui était assis du côté des autorités, celui-ci acquiesça de la tête. Elle jeta alors un coup d'œil sur Monsieur le Maire et constata que celui-ci la regardait avec admiration. En voulant s'asseoir, elle tourna un peu la tête en arrière et remarqua que c'est avec un gros sourire que Koubourath et tous les autres lauréats l’admiraient.
Tout le regard était fixé sur une seule personne : la jeune fille Adissa.
Après la cérémonie, plusieurs personnes venaient auprès d'Adissa, la saluait pour son discours.
On pouvait d'abord voir un bref échange entre la ministre et la jeune fille devant les gardes du corps. On vit la jeune fille partir avec un énorme soulagement.
Après, c’était au tour de Monsieur le Maire de la féliciter. Il fallait voir le gros sourire du maire qui posait légèrement sa grosse main sur l'épaule gauche de la jeune fille avant de parler avec sa large gorge:
- Merci ma fille, tu es déjà une figure à suivre à partir d'aujourd'hui.
- Merci beaucoup monsieur le maire, avait-elle répondu toujours avec un grand sourire.
La cérémonie terminée, chacun rentra chez soi.
Arrivés à la maison, Koubourath et Adissa étaient d'abord dans l'embarras du choix. Parfois elles prenaient les livres, parfois l'ordinateur. Elles étaient toutes excitées.
Leur père leur regardait et souriait.
Quelques semaines après, alors que la rentrée universitaire s'annonçait, le père Benoît appela ses filles pour redemander de nouveau, le rêve de chacune afin de savoir quelle voie à prendre. Cette fois-ci, Benoît commença par Koubourath :
- Koubourath, que veux-tu devenir dans les années à venir ?
- Papa, mon rêve reste toujours le même. Je dois devenir avocate.
Le père acquiesça de la tête et continua :
- Et toi Adissa ?
- Moi aussi mon rêve n'a pas changé papa. Je veux travailler dans les plus hautes institutions juridiques et judiciaires du monde. J'aime aussi les fonctions administratives, surtout les fonctions de responsabilité, de la prise des décisions car il faut prendre de bonnes et de grandes décisions.
Papa Benoît acquiesça également de la tête. Il sentit une énorme confiance en chacune de ses filles. Ses filles nourrissaient toujours bien leurs rêves et avaient vraiment un énorme désir de réussir. Après quelques minutes de silence, Adissa ajouta :
- Papa, la ministre m'avait promis de m'offrir une bourse d'étude en droit.
- Ah bon, avait-elle dit ça ?
- Oui, elle m'avait dit que ce serait au Ghana et que de vite lui rappeler via la mairie des semaines avant les rentrées universitaires.
- Oh c'est très bien. Comme ça ce serait vraiment agréable. Je vais en parler au maire demain au travail .
- Merci beaucoup papa, répondit en chœur les deux jeunes fille.
En fait, c’était vrai, lors de leur brève conversation, la ministre aurait promis à la jeune fille, de l’emmener au Ghana school of law si elle désire vraiment faire le droit.
Le lendemain, le papa Benoît après s’être allé au service, rencontra le Maire en personne et lui parla de cette nouvelle.
Le maire, connaissant Adissa, était euphorique d'apprendre cela, et jugea de mettre toute l'énergie nécessaire pour le rappeler à la ministre.
Après avoir parlé avec la ministre, le maire soumit les dossiers d’Adissa. Une semaine après, c’était encore une excellente nouvelle : Adissa fut retenue par le Ghana School of Law pour sept ans. Adissa va bientôt quitter son pays pour le Ghana. Ainsi devrait-elle revenir au pays en étant Docteure.
Nouvelle terre, nouvelle langue, nouvelle culture pour Adissa. Ah le rêve, il est capable de tout.
Tout était prêt, Adissa va partir dans quelques heures. A la maison, c'était à la fois une réjouissance et une tristesse.
Koubourath qui n'allait plus voir son amie pendant sept ans. Benoît qui pensait déjà à la douceur, au calme, à l'harmonie et la vision d'Adissa qui vont vraiment lui manquer.
Si Koubourath et Benoît s'attristaient du départ d'Adissa, Adissa elle autre pleurait en silence son départ. Elle pensait à cette famille qui lui a trouvé morte et lui a redonné vie. Cette famille qui lui a servi de lumière sur son chemin obscur. Cette famille qui lui a nourri d'armes sans rien payer, qui a même combattu à ses côtés sans rien demander. Cette famille qu'elle ne connaissait pas, qu'elle a connu surtout dans un moment sombre de sa vie. Elle pleurait tous ces faits.
En réalité, ce n'est pas ces faits que pleurait Adissa mais surtout, la manière dont ils se sont produits : avec amour sur amour. Ainsi l'amour d'aimer, d'aider, de soigner, de guérir, de comprendre de respecter était ce qui rend cette famille spéciale contrairement à sa famille d’origine. En cette famille, elle voyait l’exemple qu’elle veut que sa société adopte.
Adissa pense que cette famille est le temple même de Dieu et l'image même du monde que Dieu a toujours voulu que le monde soit. Voilà pourquoi elle pense que sa lutte doit amener toute sa société à vivre ainsi et non que ça soit seulement une seule maison.
Même si on pouvait remarquer son visage devenir un peu morose, elle devrait cependant suivre ce rêve car le rêve lui, il s'en fout des émotions ni des sentiments, tout ce qu'il veut, c'est action.
Adissa va donc partir. Quelques heures après, on l'accompagna au stationnement avec monsieur le maire, papa Benoît, Koubourath et quelques travailleurs de la commune, là où elle prit un autocar, puis disparut...
Adissa au Ghana.
Au Ghana, Adissa se retrouve dans une grande université qu'elle en a jamais rêvé. Tout était au point : des laboratoires de recherche, des bibliothèques spécialisées, des docteurs de grande envergure, et un enseignement de qualité.
Adissa semblait toujours rêver alors qu'elle était en train de le vivre.
Elle se voyait de plus en faire des pas mais ce qu'elle voulait le plus, c'est de passer à l'action, commencer par guider, par décider, par agir. Elle attendait impatiemment ce jour où elle aura la force de dire NON ou OUI à tout ce qui désavantage ou avantage aux Hommes de sa société.
Sa bourse l’aidait à prendre en charge tellement de chose. Il y a avait également une connexion régulière entre Adissa, papa Benoît, monsieur le maire et madame la ministre.
Après son arrivée, elle s'inscrit rapidement dans un centre angliciste au sein de l'université pour la bonne compréhension des cours qui se déroulaient très souvent en anglais.
Après seulement une année dans ce territoire inconnu, Adissa se fit rapidement remarquer par son talent. Ainsi, grâce à ses capacités intellectuelles à défendre des étudiants, leurs intérêts et les biens de l'université, elle fut élue présidente à l'unanimité de la plus prestigieuse association estudiantine de Ghana school of law. Elle exerça les fonctions de présidente pendant trois ans, de sa deuxième année d’université jusqu'à sa quatrième année. Elle apporta énormément de changement au sein de l'université : de la transparence, l'efficacité et la fluidité.
Les docteurs l'admiraient. Tous les étudiants de Ghana School of Law la respectaient. Tout le monde l'aimait. Ses actions menées faisaient parler d'elle. Son nom commença par figurer dans les médias et journaux dans toute l'étendue de ce territoire étranger.
Des médias de son pays aussi commencèrent par évoquer son nom. Elle commença par recevoir des félicitations des autorités de son pays sur son compte google. Adissa ne rêvait plus, elle faisait rêver.
Quand Adissa était en septième année d'université, à quelques moi de la fin, le miracle n'attendit plus à se produire.
Un jour dans sa résidence après les cours du soir, alors qu'elle lisait un roman de plus de 900 pages de l'écrivain français Victor Hugo intitulé '' Les Misérables '', elle reçut un appel direct d'un numéro de son pays, mais qu'elle ne connaissait pas. C'était le Président de la République, nouvellement élu, qui était au téléphone.
Adissa décrocha le coup de fil :
- Allô Mademoiselle Adissa, c'est le Président de la République. Avant tout, je salue ta bravoure et ta détermination. Tes actions parlent d'elles mêmes et tout le monde est fier de toi ici au pays.
Si tu entends ma voix actuellement, c'est parce que je veux récompenser ces prouesses que tu es en train de faire et que je crois, tu continueras toujours de faire, en te confiant une très grande responsabilité. Tu sais, en ce moment, notre pays a plus que jamais besoin des hommes et des femmes comme toi, prêts à défendre et à servir avec ardeur ce magnifique pays.
C'est pour cela qu'à l'issue du conseil des ministres ce mercredi, et aux différentes nominations qui ont eu lieu, j'ai décidé, après avoir vu ton magnifique parcours, de te nommer ministre de la justice de notre cher pays.
J'ai déjà parlé à ton université, tu continueras le reste de l’ années par des cours à distance. Une équipe est également mise en place pour venir te chercher dans les jours suivants. Merci beaucoup de m'avoir écouté. Penses-tu vraiment que je peux te faire confiance ?
- Oui Monsieur le Président. D'abord je vous dis merci beaucoup. Merci beaucoup pour votre aimable attention, votre confiance en moi et l'amour que vous portez envers notre très cher pays. Étant fille de ce pays, je suis pour le pays.
Je suis prête à le servir à n'importe quel moment qu’il aura besoin de moi. Merci encore monsieur le Président.
Après l'appel, Adissa jeta le livre et sauta de joie. Jamais elle n'aurait imaginé qu'à seulement vingt-six ans , elle pourrait déjà devenir Ministre de la Justice de son pays. Elle chanta et dansa seule dans sa chambre. Après qu'elle se sentit satisfaite, elle se mit à genoux, bras ouverts, yeux fermés, tête fixée dans une même direction, elle pria fortement :
- '' Père très saint, merci beaucoup une fois encore pour cette fructueuse annonce. Du fond de mon cœur, je te remercie car à chaque que je regarde derrière, je vois vraiment pourquoi tu es Dieu. Tu es le seul qui peut donner à un arbre ses jolies fleurs, et à une montagne sa force de résister. S'il ne tenait qu'à l'homme, le monde serait fini depuis longtemps car il ne pense pas comme toi. Aujourd'hui tu m'as encore hissé vers de l'avant, c'est un énorme succès, je te dis merci. Mais avant ça, tu m'as d'abord fait connaître le noir, le pire, ce que beaucoup d'hommes n'ont pas connu et donc, n'en aient pas d'idée. Voilà pourquoi tu es différent des hommes. Donne moi alors toutes les armes qu'il faut pour m'imposer dans cette nouvelle étape de ma carrière. Qu'un jour, avant que je n'ouvre la bouche pour dire que tu m'as abandonné, que j'aie d'abord ce grand cœur de dire au moins merci pour ce que tu as fait pour moi. Amen ! ''
Le lendemain elle se connecta sur son compte google, elle vit que l'information fit déjà le tour du monde.
Elle vit également des félicitations de la part de tous les autres ministères, de la part du maire, de son père Benoît, de Koubourath et de presque tous ces amis.
C'était désormais limpide, Adissa va bientôt quitter héroïquement le Ghana pour revenir dans son pays toujours avec honneur. Comme annoncé, trois jours après on vint la chercher. Adissa retournera dans son pays en tant que ministre de la justice.
Aussitôt revenue, elle rencontra directement le Président de la République qui l'introduisit dans ses nouvelles fonctions. Le président salua la détermination et l'abnégation de la jeune dame. Mais ce n'était pas tout, la jeune en venant du Ghana, avait déjà établis une liste des lois et des nouveaux changements qu'elle envisageait de mettre en application dès le premier jour de sa prise des fonctions, connaissant bien son pays. Elle profita pour en parler au président, celui-ci les mirent sous analyse. Dès le premier jour, Adissa tissa une très bonne relation avec le président. Très rapidement, le président lui dota d'un véhicule de dernière génération, des gardes du corps, en plus d’une maison dans la capitale où elle pouvait d'abord rester.
La première semaine en tant que ministre fut tellement chargée pour Adissa qu'elle n'en eut du temps même pour soi-même. Après cette semaine, elle donna rapidement un rencard à Koubourath qui continuait aussi ses études dans la même ville. Mais ayant connu une carrière d’entreprenariat après à un moment donné, elle était en ce moment en quatrième année de droit. Elle se lança dans l’entreprenariat lorsque son père lui proposa de développer une activité parallèle aux études en lui créant un centre commercial moyen dans la capitale. Le centre s'est développé au point où l'année suivante, Koubourath recruta deux employé à qui elle confia le centre basé sur la vente des produits cosmétiques et des produits agroalimentaire. Aujourd’hui, c’est lui-même qui finance ses études et en plus de ça, gagne d’argent chaque mois.
C'était la plus grande ville et la capitale économique du pays, tous les ministères s'y trouvent. Ce jour vers la soirée alors que le soleil hésitait entre se coucher et patienter, l'heure à laquelle les travailleurs se mordre les doigts pour vite regagner la maison, Koubourath apparut au portail d'Adissa. Le garde l'ouvrir, et la conduisit vers la porte qui mène au grand salon de la jeune ministre.
Après s'être vue l'une et l'autre, les deux jeunes filles, maintenant jeunes femmes, se jetèrent à bras ouverts l’une dans l'autre. Elles pleuraient de joie, elles pensaient vivre dans un rêve. Pendant un moment, elles s'embrassaient, se regardaient, se touchaient, riaient, souriaient..
Koubourath fut étonnée de la nouvelle corpulence d’Adissa :
- Ah tu as pris du poids, Adissa !
- Oui c'est ça le succès.
Les deux jeunes dames éclatent de rire. Elles se touchaient l'une et l'autre, essayaient de faire comme elles en avaient l'habitude.
- Arrête ça, on a grandi maintenant, cria Adissa en riant, puis continua-t-elle :
- N'oublie pas que c'est la ministre tu es en train de toucher comme ça.
- Euch j'avais oublié. Je pensais que c'était toujours Adissa la jeune fille, mais maintenant c'est Adissa la jeune ministre.
Elles éclatent de rire de nouveau.
- Et papa ? Demanda subitement Adissa
- Il va bien. Il dit qu'il attend impatiemment ta visite.
Adissa commença par sourire.
- Oh cher papa, il n'a pas à s'inquiéter. Je programme une rencontre avec toutes les femmes de la commune de Sébarou la semaine prochaine. J'ai déjà informé la mairie de me préparer la salle des réunions. Donc je profiterai de l'occasion pour passer quelques heures avec lui, avec monsieur le maire et avec toute l'autorité communale.
- Ah c'est très bien, tu es toujours déterminée comme avant.
- Mais bien-sûr, c'est même maintenant que la détermination commence.
Elles éclatent de rire encore.
- En fait, je pense que je dois commencer par te vouvoyer maintenant, lâcha Koubourath qui essayait de reconnaître la nouvelle force de son amie.
- Oh je pense que c'est pas trop nécessaire.
- Non, ça ne me gène pas. Après tout, << la charité bien ordonnée commence par soi-même >>, dit-on.
Elles éclatent encore de rire :
- D'accord si tu le dis. Et merci beaucoup pour la reconnaissance, seul quand on est respectueux, on est reconnaissant.
Elles se regardèrent et souriaient toutes les deux. Après seulement quelques secondes, Koubourath continua :
- Maintenant que vous êtes à la tête, que pensez-vous faire, madame la ministre ? Demanda curieusement Koubourath.
- Ah très bonne question. Écoute moi très bien. J'ai déjà dressé la liste des différents changements à faire.
Tu sais, tout va commencer par l'éducation. J'ai déjà parlé aux ministres des enseignements primaire, secondaire et de la formation professionnelle. Quand j'ai rencontré le président, j'ai aussi été claire avec lui. On va tout commencer par l'éducation, sans elle, nos efforts seront vains.
Dans les écoles, il est temps qu'on enseigne aux enfants de notre société, filles comme garçons, nos valeurs qui sont des valeurs. Pas seulement comment obtenir un bon travail ou un bon salaire mais plutôt comment vivre en société, comment considérer son semblable quels que soient son sexe, sa taille, son physique, comment l'aider, comment ne pas lui pousser à se suicider ?
Il faut résumer toute notre culture, notre tradition et nos coutumes en amour et enseignons cet amour à nos enfants. Soyons sûr qu'ils bénéficient tous de cet enseignement. Nos enfants d'aujourd'hui sont les grands de demain, eux-aussi viendra leur tour de transmettre cet amour à leurs enfants. Il n’y pas plus belle tradition que celle qui unir.
Il faut analyser, éteindre à jamais les mauvaises habitudes, et aller chercher du haut des montagnes les vraies, les bonnes et les transmettre. Cela peut paraître lent, mais c'est le long investissement qu'on puisse faire pour marquer l'histoire.
- Et après ?
- Après qu'on ai introduit cela dans l'éducation, j'ai établi une liste de nouvelles lois que le président et la cour suprême valideront et qui seront mises en vigueur dans les heures suivantes. Tout le monde sera informé.
- D'accord je comprends. Et par rapport à nos traditions, qu'est-ce qu'il y a à faire ? Pensez-vous vraiment qu'avec ce qu'on a enduré en tant que filles, rien n'y sera fait ?
- Je n'en veux pas à la tradition, mais j'en veux à l'homme qui devrait utiliser ce instrument pour prospérer plutôt que de créer sa propre tombe avec. Les traditions n'ont jamais eu l’intention de faire de mal. Comme le disait Seidou Badian, << elles sont faites pour servir l'homme, nullement pour l'asservir >>. Il est vrai que la force de l’homme, c’est sa tradition mais sans l’homme, on ne saurait parler de la tradition. Il revient à l’homme de savoir comment l’utiliser cette pour que lui, et sa tradition ne soient pas tous aliénés. C’est à l’homme de savoir que rien ne reste stable dans la vie pour autant. La tradition est comme un code électoral, il faut souvent le modifier en supprimant l’inutile ou en ajoutant l’utile, de toute façon, que cela réponde aux intérêts du modifiant. En fait j'ai compris une chose, nos parents n'ont fait que respecté ce dont leurs parents avaient fait preuve. C'est comme ça l'homme est, il n'applique que ce qu'on lui enseigne depuis tout petit.
Le seul problème avec nous nos parents, c'est qu'ils ont fait preuve d'ignorance, ils n'ont pas su que les temps ont changé et qu'il fallait mettre de côté le suivisme suicidaire et commencer par aller à l'école, par réanalyser les choses, les mettre à jour, et au lieu de continuer par haïr la fille et la femme par exemple, ne leur donner aucune chance, ils pouvaient depuis tout ce temps, se tenir main dans la main pour bâtir ensemble le monde comme nous le constatons aujourd'hui.
Il aurait certainement eu moins de sacrifices humains et plus de développement qu'aujourd'hui.
Voilà pourquoi j'insiste sur l'éducation. Nos parents ne seront plus faciles à récupérer mais ils peuvent nous suivre en voyant les efforts que nous faisons. Nous avons donc l'ultime devoir de penser de ce qui est meilleur pour notre société et l'inculquer à nos enfants nous aussi.
A chaque génération de créer sa propre histoire, peut-être qu'il viendrait un jour où une autre jugera important de marcher par la tête au lieu des pieds, nous, ça ne nous regardera plus.
- Vu que tu as parlé de l'éducation, que dire alors des gens qui ont étudié, mais qui continuent de se comporter violemment et indécemment envers les femmes dans des administrations, les lieux de travail, dans la maison et même dans les bureaux ? Moi à ce niveau, je pense que la société serait moins violente si tous les gouverneurs étaient des femmes. Ne voyez-vous pas, les belles paroles par ci, le harcèlement par là, tout ça sur les femmes ?
Même pour passer de licence à un diplôme supérieur à l'université, on te demande ton corps comme si tu n'avais pas payé l'argent d'inscription.
Dans dix jeunes filles qui sont venues pour un emploi, huit d'entre elles doivent d'abord connaître le lit de l'employeur. Celle qui refuse, sera déclarée incompétente. Dans les bureaux, n'en parlons même pas. On cherche coûte que coûte à acheter ta dignité contre ta volonté, ta conscience contre ton estime. Tout ça parce que c'est la femme qui veut, c'est la femme qui cherche. C'est tout ce qu'elle a fait pour mériter une telle infamie. Pourtant quand elle se décourage, et qu'elle abandonne, on dira qu'il n'y a pas assez de femmes au sommet, que la femme est un genre incapable. Si cette même femme décide de relever la tête, on l'absorbe, on la dénigre, on l'achète, on l'oblige, toute chose qui conduit lentement à sa perte de valeur dans la société. A un moment donné, les moins résistantes par manque de défenseurs sympathiques, qui sont souvent les plus nombreuses d'ailleurs, commencent par se détourner de leur rêve, de leur vision et puis, progressivement, elles rejoignent la classe de celles qui n'en avaient même pas essayé.
Tu comprends donc que si la femme, au lieu d'être celle qui veut, était déjà celle qui donne, au lieu d'être celle qui a besoin, était déjà celle dont les gens ont besoin, il y aurait beaucoup moins ou peut-être même ni violence, ni harcèlement, ni menace, ni servitude. Il n'y aurait que la paix, la confiance et la tranquillité dans le monde. Car c'est parce que c'est toujours la femme qui veut, c'est parce que c'est toujours elle qui aspire et non qui fait l'action.
Imaginez une école où c'est la femme qui est doyenne et qui délivre des diplômes ou attestations de formations : Va t-elle demander à chaque homme voulant obtenir un diplôme supérieur de venir dégager d'abord son énergie ?
Imaginez une entreprise où c'est la femme qui est PDG, va t-elle demander à tout homme méritant de passer d'une fonction plus basse à une fonction plus haute de venir d'abord connaître son lit ? Je pense que non. Ou même si elle le fait, ce serait de tel sorte qu'il y ait une certaine frousse qui ne la permettrait pas d'aller au bout de cette idée hasardeuse.
Oui parce que là, c'est pas elle qui veut mais c'est elle qui donne, c'est elle qui fait l'action. Il faut donc la mettre en position de donatrice et non de donataire car rien n'est aussi plus méchant que de voir son intelligence prit en otage contre son corps.
Imaginez la beauté du monde si tous les présidents étaient des femmes. Imaginez la paix qui régnerait si toutes les institutions nationales et internationales étaient gouvernées et contrôlées par des femmes. Je suis très sûre, parce que la femme monde a besoin très souvent d'altruisme, et c'est parfaitement ce que la femme africaine est. Elle n'aime ni détruire ni tuer car elle sait ce que s'est que de faire un enfant surtout lorsque c'est une femme bien éduquée.
- Ce que tu dis est vrai Koubourath. Ça mérite notre attention. Mais je compte sur la qualité de notre éducation pour que de telles erreurs ne se répètent plus. L'éducation est trop puissante, elle peut y arriver crois-moi. Par exemple, il y a un pays asiatique où le retard d'une seule minute est sévèrement puni et considéré comme chose impardonnable. Au début, c'était dur mais avec le temps ils se sont habitués car c'est inculqué, c'est enseigné. C'est aussi comme cela ça va fonctionner ici, il faut commencer par transmettre, par éduquer les enfants, leur dire '' ça c'est pas bon, ne le faites pas même si vous devenez grand '', '' ça c'est bon, faites le toujours et toujours ''.
Tu vois ? C'est comme ça qu'on peut y arriver, efficacement.
Koubourath hocha la tête, mais voulu encore en savoir un peu plus sur les idées d'Adissa.
- Tu as très bien résonner Adissa. Maintenant avec ton statut de ministre, je pense que l'idée selon laquelle la femme devrait rester dans un enclos fermé, à ne vivre seulement que pour produire et nourrir des enfants, à voir le monde à travers les yeux de son mari souvent aveugle, l'idée selon laquelle la femme ne pouvait jamais exercer de grandes responsabilités dans la société était franchement infondée et inventée. Depuis tout ce temps, c'était un gros mensonge.
- Je l'ai toujours dit : celui qui estime que la femme ne peut rien faire de grand est un homme taré qui sous-estime déjà les neuf mois d'efforts de sa mère.
Notre société n'était pas sans savoir que la femme pouvait faire des choses monumentales, ils ne voulaient juste pas qu'elle y arrive. Mais aujourd'hui je suis fière parce que plusieurs hommes ont pris conscience. Regarde notre papa Benoît, c'est un homme mais il nous poussait toujours vers le succès alors que d'autres à sa place nous auraient poussé vers le mariage. Il était toujours un homme sociable, ne discriminant personne .
Regarde aussi monsieur le maire, il m'a tellement aidé, que dire du président de la république ? Tous ces hommes ont compris, ils ont compris que pour avancer, c'est main dans la main, fille comme garçon, homme comme femme, vieux comme vielle, tous ensemble.
Tu as parlé de mon statut de ministre, oui c'est vrai. Mais je suis pas la première femme à le devenir. Regarde la ministre du numérique qui m'a aidé, elle est aussi une femme, très jeune comme moi.
Partout en Afrique, il y a eu des femmes qui ont marqué leur histoire, qui ont tellement travaillé pour nous servir d'exemple lorsqu'on était petite. Avec le temps, ça va devenir une habitude, il n'y aura plus de surprise lorsqu'une femme réussit.
Un petit silence régna, mais Koubourath reprit:
- Tu sais, je ne sais vraiment pas comment expliquer à nos enfants que tu as pu réussir dans toutes ces conditions. Il faut qu'on écrive ton histoire pour l'enseigner aux futurs enfants et l'utiliser pour motiver à tous ceux qui auraient perdu espoir.
Adissa sourit, puis replia-t-elle :
- Merci pour les compliments. Mais c'est simple, il faut dire aux futurs enfants et même à tout le monde de ne pas remettre les choses à demain. Il ne faudrait pas qu'ils attendent une autre génération pour résoudre leurs problèmes. Ils doivent commencer par les résoudre eux-mêmes car pour moi, remettre les choses à demain, c'est fuire ses responsabilités, prôner son incapacité et non seulement ça mais c'est aussi un moyen pour noyer sa génération et la faire perdre de toute notoriété. Vu que les générations ne passent et ne repassent jamais, la leur mourra et disparaîtra sans que rien de grand n'eût été fait.
- Comme vous venez de le dire, je pense à toutes ces filles et femmes de notre pays qui auront désormais le soutien total du gouvernement, à tous ces hommes prêts à adopter une nouvelle manière de pensée, d'agir et de réagir. Tout ça va rendre notre société vivable. Nous, on n'avait vraiment pas eu la chance de connaître ça. Je pense que c'est vraiment ça le succès : rendre meilleur ce qui était fauché.
La ministre acquiesça de la tête, puis d'une voix faible et rassurante, dit-elle :
- Oui tu as raison, après tout ça, on peut être vraiment fière d'avoir existé, on se serait battue.
Koubourath comme toujours, était ébahie des analyses judicieuses de son amie, maintenant jeune ministre. Mais à ce moment, l'atmosphère était tellement gaie que chaque mot venant de l'une de ces deux jeunes suscitait attention et méditation. Alors Koubourath décida un peu d'apporter de la gaieté :
- Alors dis-moi Adissa, après tout, où serai-je moi dans tout ça ? Demanda gaiement Koubourath qui attirait l'attention de son amie sur ce qu'elle pense d'elle.
Adissa sourit largement, elle afficha ensuite un visage sérieux puis dit-elle :
- Je savais qu'on en arriverait là. En fait c'est la raison même pour laquelle je t'ai appelé. Tu sais Koubourath, on s'est connu depuis toute petite et on dit souvent que les oiseaux de même plumage, volent ensemble. Si je suis ici, c'est grâce à toi. C'est ainsi la vie, il faut être reconnaissant.
Tu as tellement des valeurs dont le ministère a besoin et dont le pays a besoin aussi. Il n'y a pas mieux ailleurs que toi actuellement. Voilà pourquoi on doit continuer à travailler ensemble, à unir nos idées comme on l'a toujours fait .
Pour cela, on va travailler ensemble ici au ministère. Tu seras ma directrice de cabinet.
Koubourath n'en croyait pas à ce qu'elle venait d'entendre. Elle se jeta immédiatement dans les bras d'Adissa. Les deux jeunes dames pensèrent vivre dans un rêve. Elles s'embrassaient, se touchaient, pleuraient et sanglotaient de joie..
Le lendemain, quelques jours avant l'arrivée d'Adissa la jeune ministre de la justice dans la ville de Sébarou, tout le territoire national fut d'abord touché par les nouvelles lois qui viennent de voir le jour depuis quelques heures et dont les médias ne cessent d'en parler.
Ainsi, la chaîne nationale du pays pendant le journal de midi, diffusa les nouvelles règles adoptées que ceux qui avaient de la radio pouvaient écouter sous forme d'audio :
- Mesdames et messieurs, bon après midi et bienvenue dans ce bulletin d'information. Comme on vous l'annonçait depuis quelques jours, le gouvernement vient de faire un pas significatif dans la vie de ses citoyens et dans l'éducation en validant les nouvelles mesures prises par les ministères de la justice et des enseignements.
Voici en quelques sortes ces nouvelles règles qui seront mises en vigueur à partir d'aujourd'hui sur toute l'étendue du territoire national : il n'y aura plus du mariage forcé. Le mariage des jeunes filles aussi interdit. Tout enfant, fille comme garçon, âgé d'au moins trois ans ou plus doit commencer à aller à l'école. L'éducation désormais gratuite de la Cour d'Initiation jusqu'à l'année d'obtention du Brevet d'Etudes Premier Cycle pour tout élève sans distinction. Une bonne partie de l'éducation sera désormais basée sur des valeurs et culture africaines du cours primaire jusqu'au cours secondaire premier cycle. Les écoles seront dotées de nouveaux matériaux de qualité pour assurer un enseignement de qualité. Toutes les femmes vont désormais profiter d'un accompagnement financier sous forme de prêt de la part du gouvernement pour que chacune d'entre elles puisse développer une activité lucrative, cela permettra à chaque femme de se sentir responsable et de commencer par jouer un rôle clé dans la société quel que soit son domaine d'activité. Désormais, il aura aussi partout dans chaque ville et certains villages du pays, des tribunaux, des commissariats et des cabinets de dénonciations pour tout acte violent sur un citoyen ou citoyenne. Ont signé la Ministre de la Justice, le Ministre des Enseignements Maternel et Primaire, et le Ministre des Enseignements Secondaires, Technique et de la Formation Professionnelle.
- Oh enfin, Dieu a pris pitié de nous, disaient certaines vieillardes auditrices.
- C’est vraiment un soleil qui vient de nous éclairer
Ce jour à 09h du matin, Adissa, Ministre de la justice se rendit à Sébarou pour sa première visite officielle en tant que nouvelle ministre de la justice, deux semaines après sa nomination.
L'objectif était de rencontrer toutes les femmes de la commune de Sébarou, la commune qui lui a tout donné, leur écouter, leur encourager et leur sensibiliser sur les enjeux des nouvelles réformes que vient d'admettre le pays et qui auront désormais un impact significatif au sein de leur société.
Un immense nombre de personnes étaient déjà réuni à la mairie, y compris même des hommes et des enfants, tous attendant la jeune ministre. Au portail, aux alentours, dans la salle, il n'y avait plus d'espace.
Adissa qui, cinq ans avant, vit la ministre du numérique venir avec un cortège de véhicules pour la cérémonie d'excellence, vint également cinq ans après, au même endroit, à la même heure avec aussi un cortège de véhicules en tant que ministre de la justice.
Après qu'elle descendit du véhicule sous la surveillance de ses gardes du corps, toute la masse criait, '' Adissa '', ''Adissa'', ''Adissa'', ''Adissa'' ''Adissa'' ''Adissa'' .
Certaines femmes criaient et criaient :
- '' Adissa ! Nous sommes venues de Kpara, ton village. On te salue ! On te salue ! ''
Après quelques instants, Adissa fondue en larmes. Elle n'a pas pu résister à tout ce monde qui cherchait à lui toucher, qui scandait son nom, qui lui rappelais d'où elle vient. Elle sentit une énorme chaleur indescriptible qui frissonnait tout son être et transcendait ses pensées , ses imaginations. Elle pensa un moment à son village, à cette ville, à sa vie et fondue encore beaucoup de larmes.
Elle prit son mouchoir, sécha ses larmes, et reçu le maire et l'autorité communale qui vinrent respectueusement vers lui. Au lieu d'attendre que le maire et son autorité s'inclinent en premiers, elle fut la première à s'incliner en faisant signe de baisser la tête.
Comme toujours, le maire marchait avec à ses côtés, papa Benoît. Adissa se jeta d'abord dans les bras de Benoît, l'embrassa très fort et les deux hommes fondus de nouveau en larmes. Après Benoît, Adissa vint saluer encore le maire et s'embrassèrent fort aussi.
Avant que les autorités ne s’installent, elle entendit son téléphone vibrer. C’était un message qu’elle venait de recevoir. Discrètement, elle fit sortir le téléphone, se courba un peu derrière et lire discrètement le message :
__’’ J'aurais aimé être une fille, faire mon maquillage chaque jour, me laver au moins quatre fois le jour, être trop chérie par ma mère, donner un odeur agréable partout où je passe, attirer l'attention partout où je marche, surexciter avec un simple sourire, entendre des '' je t'aime '' de la part des vrais et des faux. J'aurais aimé être une fille, devenir une femme pour être le socle du monde, celle par qui le monde fleurit, pour qui le monde vit.
Je t'aime.
Ton ami Justin, depuis le Ghana.’’
Elle coula encore des larmes, mais fit semblant de ne rien lire…