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Mon pire reflet 11

« Connaissez-vous beaucoup d’hommes aimants qui refuseraient une jolie femme s’offrant ? » Cette question rhétorique d’Albert Camus ne nécessite pas une longue réflexion. Connaissez-vous beaucoup d’hommes pas forcément aimants qui refuseraient une jolie femme s’offrant ? Quand le désir frappe à la porte, il peut faire taire et les la bienveillance et les valeurs. C’était un soir pas comme les autres. La nuit avait un aspect plus sombre, une noirceur qui ne se faisait pas ressentir que dans le noir qu’on observait mais aussi dans l’air glacial qui faisait frissonner. Pourtant, l’atmosphère n’était pas coupable de tous les frissons qui se ressentaient cette nuit-là. Le baiser qu’échangeaient Mario et Yamina devenait de plus en plus vivace. Alors que la glace fondait sur le canapé en toute liberté, ils Mario souleva Yamina et trouva le chemin de la chambre comme un vieil habitué. Ils profitaient de ce moment merveilleux mais Mario n’avait pas oublié de se protéger. Juste avant de franchir la porte du non-retour, Yamina revu l’image de Tiago et de leurs moments ensemble. Elle arrêta immédiatement Mario et se rhabilla.

- Je ne peux pas faire ça, avança-t-elle. Je suis désolée.

- Non c’est moi qui suis désolée, je n’aurai pas dû. Il faut que j’y aille maintenant. Prends bien soin de toi. Prends ta journée de demain pour te remettre en forme.

- Merci.

Yamina fit un câlin d’au revoir à Mario qui s’en alla ensuite.

De son côté Tiago avait fini de diner et se préparait pour rejoindre son lit. Il avait changé les draps depuis le départ de Yamina mais il n’arrivait pas à mieux dormir. Il entendit sonner à sa porte et avec beaucoup d’efforts, il alla ouvrir s’attendant à voir Théo ou Safi. Voir Rim debout à sa porte lui avait fait un choc. Il ne s’attendait pas à la voir là, à sa porte comme autrefois. Le temps avait passé depuis mais elle n’avait pas beaucoup changé, le même sourire qu’elle affichait en toute circonstance, la même beauté et la même étincelle dans les yeux. Tiago n’avait pas pu s’empêcher de remarquer ses chaussures rouges qu’elle portait avec sa petite robe grise.

- Tu, tu n’as pas changé.

- Bonsoir Titi.

- Plus personne ne m’a appelé comme ça depuis des années.

- Ça se voit que tu as beaucoup changé.

- Toi tu es restée la même, avec ta passion inexpliquée pour les chaussures rouges.

- Alors, tu ne m’invites pas à entrer ?

- Je t’en prie entre.

Rim était entrée et avait retiré ses chaussures à la porte. Elle ne s’était pas gênée pour aller prendre une bière et deux verres dans la cuisine. Elle remarqua que les coussins étaient disposés pêle-mêle sur le canapé et elle les rangea avant de s’assoir. Quelques objets qui n’étaient pas à leurs places attirèrent son attention et elle dirigea son regard vers Tiago.

- Tu dois avoir de sérieux problèmes pour laisser ton appartement dans un tel état.

- Je crois que j’ai copié ça d’elle, réalisa Tiago avec un léger sourire. Elles ne sont pas toutes comme toi. Cette fille se foutait pas mal de mes habitudes, elle prenait plaisir à me défier et à modifier l’ordre des choses. Je crois qu’elle aime bien me pousser à bout en faisant tout l’inverse de ce que je voulais qu’elle fasse.

- Elle doit être très courageuse.

- Peu de choses lui font peur, c’est une vraie effrontée.

- Tu as trouvé une qui te ressemble.

- Malheureusement deux personnes de même caractère n’arrivent pas à cohabiter longtemps. Où étais-tu passée Rim ?

- J’ai vécu pas mal de choses en commençant par la perte de mon mari.

- Je ne comprends toujours pas comment il a pu mourir si vite, il était jeune je suppose.

- Oui il l’était mais c’est ainsi, a vie est imprévisible. Il aurait pu vivre ses derniers moments sur terre dans le bonheur s’il n’avait pas insisté pour épouser une femme qui ne l’aimait pas.

- Je n’ai jamais compris pourquoi tu t’es mariée si vite, une telle trahison de ta part.

- Tu nous as trahi le premier. Je ne suis pas là pour parler du passé. J’ai vu ton message et je suis là. Nous avons vécu tellement de choses et Dieu sait que je t’ai aimé plus que ma propre vie. Je ne suis pas venue vers toi car je ne savais pas si tu voudrais me revoir mais maintenant que je sais, je viens te récupérer.

- Ce n’est pas si simple. Beaucoup de choses ont changé. Oublier Yamina ne sera pas si facile.

- Tu sais très bien qu’aucune femme ne sera assez folle pour t’accepter avec tous tes défauts, ton passé obscur. Je suis la seule à vraiment savoir qui tu es, accepte la réalité et cesse de vivre dans un conte.

- Tu m’as fait beaucoup de mal Rim, tu m’as laissé tomber quand j’avais le plus besoin de toi.

- Mon cœur ne t’a jamais abandonné. Cette fille ne te connais pas comme moi je te connais et elle ne t’aimera jamais comme moi je t’aime.

- Peut-être.

- Tu n’as pas touché ta bière.

- J’ai arrêté l’alcool, il faut que je pense à sortir toutes ces bouteilles.

- Tu n’es visiblement plus le même homme. Qu’as-tu arrêté d’autre ?

- Les combats.

- Tu te fous de moi !

- Non.

- Comment arrives-tu à gérer tes impulsions sans ça ?

- En pensant à la promesse que je lui ai faite.

- J’avoue que je suis surprise mais comme je te l’ai dit mon amour, je t’aime et je t’aimerai toujours peu importe tes décisions.

Un taxi venait de se garer juste devant un bar pour déposer Yamina. Elle était entrée et avait demandé d’après un certain Waheb. On lui montra l’homme assis dans un coin du bar et elle alla le retrouver.

- Que viens-tu faire ici ? Paniqua le jeune homme.

- C’est comme ça tu me parles après le mal que tu m’as fait ? Tu te rends compte que tu ne t’es même pas excusé pour m’avoir refilé ton sale virus ?

- Tu t’es bien vengé non ? Que veux-tu de plus ?

- Venger ? De quoi parles-tu ?

- Tu n’as qu’à demander à ton copain ou je ne sais quoi. Pars d’ici, je ne veux pas d’ennuis.

- Je te jure que je ne comprends rien de ce que tu me dis.

- Il m’a dit que j’avais fait du mal à sa copine, je ne savais pas de quoi il parlait jusqu’à ce qu’il me demande de rester loin de toi. Il était avec deux autres hommes. Regarde ce qu’ils m’ont fait.

Waheb retira son bonnet qu’il avait sur la tête et Yamina éclata de rire. Ils avaient écrit sur son front ‘‘J’ai le SIDA’’. Waheb gagnait sa vie en faisant des tatouages et c’est d’ailleurs comme ça qu’il avait connu Yamina. Elle était venue un soir pour se faire tatouer et il était celui qui lui avait tatoué un corbeau à l’omoplate.

- J’avoue que ce n’est pas drôle comme tatouage mais ça t’apprendra. Je ne savais pas que Tiago avait ce genre de talents. Je lui demanderai peut-être de me tatouer la tête que tu fais quelque part sur mon majeur.

- Si ça t’amuse de te faire déchirer la peau par une clé.

- Quoi ? Affirma Yamina choquée.

Elle réalisa alors qu’il ne s’agissait pas vraiment d’un simple tatouage mais vraies et profondes coupures. Son sourire taquin se replia et elle se dépêcha de prendre la porte.

Tiago venait de passer un moment très intime avec Rim mais il semblait ne pas aller mieux. Rim était très en colère car sans le savoir Tiago l’avait appelé Yamina dans le feu de l’action. Elle ne lui avait pas dit mais elle le vivait mal. Le jeune homme n’avait même pas remarqué sa mauvaise humeur car toutes ses pensées étaient dirigées vers Yamina. Elle lui manquait comme jamais. Il enfila alors sa chemise se mit assis près du lit. Rim n’était toujours pas habillée.

- Tu comptes rester dormir ? Demanda Tiago pressé qu’elle s’en aille.

- Tu me mets à la porte ?

- Non mais je dois vraiment sortir.

- Tu vas la retrouver n’est-ce-pas ?

- Rim,

- Tu n’es pas obligé de répondre, je te connais bien assez. Sache juste que quand tu réaliseras qu’elle n’est pas faite pour toi je serai là à t’attendre, tu connais mon numéro.

- Tu peux toujours rêver, hurla Yamina qui venait de s’inviter dans la chambre en balança la robe de Rim à sa figure. Rhabille-toi et sors d’ici.

- Tu dois être cette Yamina, supposa Rim. Je me présente, je suis Rim, son ex, la seule femme qu’il ne pourra jamais oublier, je suis dans son cœur et marquée sur sa peau à jamais.

- Laisse-nous s’il te plait, demanda Tiago à Rim qui enfila sa robe et quitta l’appartement en claquant la porte.

Tiago se leva et s’approcha a de Yamina, celle-ci n’avait pas cessé de le rouer de coups jusqu’à ce qu’elle soit à bout de forces. Il l’avait laissé faire et l’avait ensuite serré dans ses bras quand elle arrêta enfin.

- Comment as-tu pu me tromper avec ton ex ? Cria Yamina en se détachant de lui. Depuis combien de temps habite-t-elle ici ?

- Elle vient à peine d’arriver.

- A peine tu dis ? Toute la pièce pue son parfum si on peut appeler cet encens un parfum.

Yamina retira les draps dans sa crise de colère et alla les balancer à la poubelle. Tiago n’avait pas bougé et l’avait laissé faire tout ce qu’elle avait envie de faire. Elle s’était ensuite mise assise sur le bord du lit et Tiago l’avait rejoint.

- Tu m’accuses à tort de te tromper alors que toi en plus de me tromper tu le fais avec ton ex.

- Techniquement, je ne t’ai pas trompé Yamina, nous ne sommes plus ensemble.

- J’aurai bien pu coucher avec Mario alors.

- Quoi ? S’énerva à son tour Tiago. Il se passe quoi avec ce docteur ? Est-ce-que tu sors avec lui ?

- Regarde la tête que tu fais, je ne suis pas comme toi. Je me suis peut-être laissée aller un moment mais je n’ai pas trahi mes sentiments.

- Il t’a touché ?

- On a bien failli passer cette nuit ensemble mais nous n’avons pas échangés plus que quelques baisers. Je t’aime Tiago et je ne veux pas me séparer de toi.

Tiago serra Yamina contre lui et pour une fois depuis deux semaines et revivait à nouveau.

- Si tu n’étais pas venu, je serai allé te chercher. Je ne veux pas d’une autre que toi, ça me manque de te voir entrer ici les chaussures pleines de sable, de devoir toujours ranger ton bazar. Je n’aurai jamais cru que le fait que tu m’irrites tant aurait pu me manquer. Je pourrai ne pas boire une goutte d’alcool tout le restant de mes jours si tu es là avec moi. J’aime nos moments ensemble, t’entendre me demander de me protéger quand je te fais l’amour car c’est l’une des rare fois où j’arrive à te dire non. Je veux être avec toi et t’aimer tel que tu es, avec tes défauts et tes gouts étranges.

- Ça me fait plaisir d’entendre ça car je refuse de te laisser partir, je refuse d’aimer un autre que toi. Tu es le seul dont les baisers arrivent à faire perdre la tête. Cependant, je voudrais que tu ne me caches plus rien.

- De quoi parles-tu ?

- Waheb.

- Il est venu te voir ?

- Non, c’est moi qui suis allée le voir après que Marcus m’ait agressé et ait sous-entendu que je t’envoyais faire du mal aux gens.

- Il t’a agressé ? Se révolta Tiago en remarquant les bleus sur le visage de Yamina. Je te jure que je vais le tuer.

- Tiago, non. Ça suffit tout ça. Tu es allé chez Waheb avec deux hommes, qui étaient-ce ?

- Théo et Marcus. Je n’aurai jamais dû laisser cet imbécile nous suivre.

- Ce que tu lui as fait, c’était abusé.

- Ton cher Waheb ne semblait pas être disposé à arrêter, un avertissement sur le front et sur les fesses était moins grave que ce qu’il faisait aux femmes. D’ailleurs la nouvelle s’est très vite rependue et plus personne ne va se faire tatouer chez lui. les gens comme lui sont capables d’infecter les autres par plaisir.

- Parce-que tu lui as écrit ce truc sur les fesses aussi ?

- Il n’a pas osé te le dire ça. Je lui ai offert un ticket abstinence pour la vie ou du moins jusqu’à ce qu’il trouve le moyen de cacher ça.

- Ça me fait un peu peur de savoir que tu sois capable d’infliger ça à un homme.

- Comme ça me fait peur de savoir que tu aimes qu’on t’inflige certaines choses.

- C’est un problème dont on va devoir parler.

- Oui mais avant il y a deux petites choses que je ne t’ai pas révélé sur moi. Je vais te dire la première mais la seconde, je te demanderai de me donner du temps. C’est beaucoup moins facile à dire.

- Je t’écoute.

- Les combats pour moi ne sont pas qu’une façon de gagner de l’argent. Quand j’ai battu cet homme que je pensais être l’amant de Rim, j’avais réussi à calmer au maximum mes impulsions et ça m’a fait un bien fou. Je t’ai expliqué que j’étais plutôt violent pendant mes crises. Quand cela arrivait j’avais tendance à m’en prendre aux autres et à me réjouir de leur souffrance. Après cet épisode avec ce pauvre homme, Rim et moi avions trouvé la solution parfaite pour maintenir mes démons en cage, les combats. Si j’étais toujours le champion c’est parce-que mon seul but n’était pas la victoire, je ne me battais pas contre mes adversaires mes contres mes démons intérieurs. Tu ne m’as jamais vu me battre. Quand je suis sur le ring je ne suis plus le même homme, si on ne m’arrête pas, je suis capable de tuer. C’est pour ça Rim venait toujours avec moi et quand j’entendais sa voix dans la foule je savais que c’était le moment d’arrêter. Quand elle m’a quitté les choses ont changé. Je ne pouvais pas prendre le risque de tuer quelqu’un alors j’avais arrêté les combats. Inconsciemment j’ai redirigé cette rage vers ma propre personne. Je me sentais coupable de son départ et j’avais besoin d’une victime. Je suis alors devenu ma propre victime. J’ai commencé à me déchirer la peau jusqu’à ce qu’un jour je fasse une entaille plus profonde. Je m’étais coupé la veine sans trop faire exprès. Quand Théo m’a retrouvé j’étais presque mort. Par chance je suis en vie mais je ne vais toujours pas bien et si je ne trouve pas le moyen de contenir ce mal je ne pourrai pas vivre en paix.

- Tu devrais consulter un spécialiste Tiago ou au moins en parler à Mario.

- Il n’est pas question que je me confie à cet homme maintenant que je sais qu’il est intéressé par toi.

- Tu te rends compte que ce qu’on voit comme un problème est plutôt une solution ?

- Je ne comprends pas.

- Toi tu as besoin de canaliser toute cette énergie débordante et moi je prends plaisir à jouer les victimes.

- Yamina,

- Je sais que tu n’as pas envie de me faire du mal et sois sûr d’une chose, tu ne me feras pas du mal. Nous ne ferons rien de dangereux.

- Je ne sais pas si ça marchera.

- Nous ne perdons rien à essayer. Si ça ne marche pas je te promets de t’acheter un gros punching-ball.

- Viens là, murmura Tiago avant de serrer à nouveau Yamina dans ses bras.

- Je ne veux plus voir cette Rim ici.

- Ne t’inquiète pas pour ça.

- Je vais rester dormir avec toi, Mario m’a donné ma journée de demain.

- En plus il te fait des faveurs.

- Il sait que je ne vais pas bien, c’est lui qui m’a sauvé de Marcus.

- D’abord il t’emmène diner, ensuite il te sauve, il t’embrasse et tente de coucher avec toi et maintenant il te donne des jours de congé. Yamina, je ne veux pas que tu fréquentes cet homme.

- N’as-tu donc pas confiance en moi ?

- J’ai confiance en toi mais en lui non. Tu iras au cabinet demain et tu lui diras que tu démissionnes.

- Je ne vais pas faire ça.

- Je ne te donne pas le choix. Je veux que tu démissionnes.

- Ce n’est pas facile de trouver un travail et je dois payer mon loyer.

- Pas si tu emménage avec moi.


Episode 12...


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